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ainsi les marchés étrangers, — « les grands capitaux étant les grandes machines de guerre » pour avilir les prix des denrées premières, tandis que ceux des objets manufacturés se maintiennent élevés[1]. Qu’est-ce que cela ? sinon un colossal communisme, qui met les fortunes et le bonheur de toutes les populations de la terre à la merci d’une nation éloignée, dont le système se base sur l’avilissement des prix de tout ce qui est matière première pour les manufactures, y compris le travail. Si M. Bastiat eut apporté plus d’attention à étudier le sujet, il ne lui serait pas échappé, nous le pensons, que la question à résoudre par les mesures de protection est celle-ci : un peuple doit-il entretenir les gouvernements étrangers ou le sien propre ? La France et toutes les nations qui marchent sur sa trace entretiennent le leur propre. — L’Irlande, l’Inde, la Jamaïque, la Turquie, le Portugal et les États-Unis supportent ceux de pays étrangers, tout en étant privés eux-mêmes de revenu.

La protection ayant pour but, et pour but unique de produire la diversité dans les modes d’emploi, les droits protecteurs sont temporaires de leur nature, — leur nécessité tend à diminuer par degrés et à laisser le commerce libre. Les droits qui assurent le revenu, et qui n’ont d’autre but que l’entretien du gouvernement, ont un caractère de permanence qui n’existe pas dans les autres. Néanmoins M. Bastiat voit peu d’objection à ces dernières interférences dans le commerce, tandis qu’il proteste contre les premières. Ici encore on retrouve le défaut de logique de l’école moderne[2] ?

L’introduction de la maxime du laisser faire a eu récemment son historien, un Anglais, qui s’est si bien acquitté de la tâche, que nous croyons devoir le citer textuellement. « Le laisser faire n’est autre chose que ceci : — Le gouvernement met de côté tout reste de caractère moral, toute prétention à ces sentiments de respect

  1. Voy. précéd., vol. I, p. 482.
  2. Ici M. Bastiat se trompe ainsi que toute l’école du libre-échange généralement, en préférant les droits d’octroi et ceux des ports aux taxes directes, sous prétexte qu’ils sont « peu sentis. » (Voy. Dict. de l’Économie politique, article « Octrois. »
      M. Chevalier prétend que, nonobstant la perception de 500 millions de francs pour droits de douanes, le libre-échange est un axiome du gouvernement anglais. — Examen, p. 163.