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guerres tant étrangères que domestiques, et surtout précisément dans le demi-siècle qui a précédé la formation du Zollverein. En voyant tout cela, ce qui doit surtout étonner, c’est qu’on l’ait obtenu en si peu de temps[1].

§ 3. — Les femmes saxonnes vendues comme esclaves. Amélioration générale dans la condition de la femme en Angleterre. Perte des droits de propriété que leur assurait l’ancienne législation anglaise. Détérioration de la condition du sexe, dans tous les pays qui se guident sur l’Angleterre.

À l’époque des Plantagenets, on exportait les femmes saxonnes pour les vendre comme esclaves, — c’étaient les hommes d’Écosse et d’Irlande qui les achetaient. Cependant avec l’augmentation de richesse et de population, leur condition s’est améliorée par degrés ; ce qui n’empêchait pas que, sans remonter plus haut qu’à l’époque de Blackstone, les gens du commun, nous dit-il, réclamassent et exerçassent le privilège que leur assurait la vieille loi, d’infliger à leurs femmes « le châtiment dramatique, avec modération, » On comptait cependant déjà 200.000 petits propriétaires, dont chacun avait femme et enfants, et un de ces logis qui faisaient l’admiration d’Adam Smith et qu’il a si bien décrits.

Néanmoins, quant à ce qui regarde tout droit privé de propriété, la position des femmes anglaises a été constamment empirant ; — celle qu’elles ont aujourd’hui est bien au-dessous de ce que leur garantissait la vieille loi anglaise. Encore sous le règne de Charles Ier la femme, en se mariant, conservait tout son bien produit, et acquérait droit, comme douaire, sur les biens réels et personnels de son mari, en cas de pré-décès de celui-ci. Depuis, ces droits ont entièrement disparu, la loi donne au mari la propriété entière de sa femme et n’assure rien à celle-ci. Quelque follement dépensier que puisse être le mari, la femme ne peut posséder à part ; — tout ce qu’elle gagne appartient à son partner et elle devient solidaire pour le payement des dettes qu’il contracte. Dans aucun autre pays qui se prétend civilisé, la femme n’est aussi complètement à la merci de son mari, — n’est autant son esclave — qu’elle l’est en Angleterre.

Si nous venons aux nations qui marchent à la suite de l’Angleterre, nous trouvons un mouvement précisément inverse de celui des peuples qui suivent la trace de Colbert et de la France, — la proportion de la classe des intermédiaires y augmentant tandis qu’elle devrait diminuer. Chez toutes le mouvement est vers la

  1. Pour ce que dit le chevalier Bunsen des effets de la guerre, comme ils se sont manifestés en Allemagne et en Russie, voy. précéd. vol. II, p. 144.