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savoir nous fournissant une perception plus complète, la parfaite adaptation de l’appareil pour la production du grand effet désiré — celui de préparer l’homme animal à occuper dignement la place à laquelle il était destiné dès le principe.

§ 2. — La misère et le vice attribués à l’insuffisance des pouvoirs de la terre pour fournir à la population croissante. Ne peut-on pas au contraire les attribuer à ce que l’homme manque lui-même à se rendre apte à adresser des demandes à la terre ? Les faits de l’histoire attestent que la difficulté provient de l’homme lui-même et non des erreurs du Créateur

Le doublement de mille millions d’hommes, nous affirme M. Malthus, peut s’opérer en vingt-cinq ans par le principe de population comme celui de mille. « Pourquoi alors ne s’est-il pas opéré ? Au commencement de notre ère la terre comptait ce nombre d’habitants ; il est douteux qu’elle en compte aujourd’hui davantage. Si le doublement s’était opéré à chaque quart de siècle, elle compterait aujourd’hui des millions de millions. Pourquoi cela n’a-t-il pas eu lieu ? Parce qu’en tout temps, nous dit-on, la population a exercé une pression sur la limite de subsistances, —et ta tendance de la matière à prendre les formes du plus haut développement ayant dépassé tellement celle manifestée au regard de Ces formes inférieures dans lesquelles elle est prépare pour l’usage de l’homme, qu’elle a produit une expansion « du vice et de la misère, » — d’où a résulté une nécessité des freins positifs, « des guerres, de la peste, de la famine[1]. » Dans tout ceci, quelle est la cause et quelle est la conséquence ? La misère et le vice sont-ils cause du manque de l’offre des subsistances, ou celui-ci. Y-a-t-il une conséquence nécessaire de ce que l’homme a négligé d’exercer les facultés dont il a été doué ? C’est là une question très-importante : — la négligence de l’homme est une faute à laquelle il est en lui de remédier ; au lieu que l’inefficacité des pouvoirs de la grande machine donnée pour qu’il s’en serve serait entièrement sans remèdes.

La réponse se trouve dans ces faits : que l’offre des subsistances dans les quelques derniers siècles a augmenté dans sa proportion avec la population en Angleterre, en France, en Belgique, en Allemagne, et dans tous les pays — où population et richesse ayant eu liberté de s’accroître, —l’homme a acquis plus grande faculté de tirer sur le trésor de la nature, tandis qu’elle a diminué dans les pays, — où population et richesse ayant décliné, — le crédit de l’homme sur les semées de la nature a baissé. Regardons autour de nous aujourd’hui, n’importe où, nous trouvons que là où se dé-

  1. Principles of Population, liv. I, ch. ii.