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Le fait que la centralisation tend à s’affaiblir à mesure que s’élève la valeur de la terre et du travail, est attesté à chaque page de l’histoire. Et comme cette élévation ne manque jamais de résulter du rapprochement des prix des matières premières, de ceux des utilités achevées ; il s’ensuit nécessairement que la tendance à la liberté doit être en raison du développement du commerce et de l’affaiblissement de pouvoir chez ceux qui vivent du trafic. Quelque oppresseur que soit un gouvernement, — quelle que soit sa tendance à guerroyer, — la marche continue d’une politique qui tend à ce que le consommateur prenne place à côté du producteur, doit aboutir à faire de la paix la condition habituelle de la société.

§ 5. — La centralisation croît à mesure que s’accroît le pouvoir du trafiquant.

La centralisation croit avec le trafic qui gagne en pouvoir ; — l’écart grandit entre les prix des matières premières et ceux des utilités achevées ; — la terre et le travail perdent en valeur ; — le rapport de la taxation à la production s’élève.

M. Mac Culloch donnait, il y a sept ans, pour la taxation totale de la Grande-Bretagne et de l’Irlande le chiffre de 73.000.000 liv. sterl. ; il dépasse aujourd’hui 90 millions, et il est probablement plus près de 100 millions ; tandis que le total de revenu annuel ne va pas à plus de 55 millions, — ceux qui dirigent le gouvernement prenant ainsi deux tiers de plus qu’il ne va en tout à ceux qui possèdent la terre. La taxation totale de la France, pour les subsides au gouvernement, est de 1.200 millions de francs. En y ajoutant pour contributions locales et pour la taxe imposée par la conscription, même 500 millions, nous avons un total de 1.700 millions, — ce qui est moins que les cinq sixièmes du revenu annuel de la terre. D’où il suit que la proportion de la taxation à la valeur de la terre se trouve être en Angleterre presque le double qu’en France.

Par qui ces lourds impôts sont-ils payés ? Nous l’avons déjà vu. Ce sont autant de contributions frappées sur la terre et le travail de tous les pays qui épuisent leurs terres en envoyant au dehors leurs matières premières, — et reçoivent en retour une part in-

    injuste. Retombant comme il fait entièrement sur ceux qui ont besoin de vendre leur travail, il force ceux qui ont peu de propriété à protéger, de payer un lourd impôt dont le grand capitaliste se trouve à peu près exempt, s’il tombe au sort, il se procure aisément un remplaçant. Son voisin pauvre, qui ne peut payer, doit servir ; et, pendant le temps de service, il lui est alloué, pour tous salaires annuels, la nourriture, l’habillement et environ cinq dollars.