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le propriétaire foncier pour l’usage de la terre moyennant payement d’une rente fixe et déterminée, contrat qui le décharge pleinement de toutes demandes capricieuses et incertaines pour un service personnel. Le tenancier devient aussi un homme libre — qui contracte avec son souverain pour le payement d’une certaine somme déterminée, et par là s’affranchit lui même d’une interposition dans les échanges qu’il pourra contracter avec ses associés.

§ 3. — Le commerce tend à devenir plus libre à mesure que s’abaisse la proportion de propriété mobile, relativement à la propriété fixée. Phénomène que présente à étudier la France et les États-Unis.

Que telle doit être la marche des choses dans les sociétés en progrès, le diagramme ci-dessus le met en évidence, — l’espace occupé par la propriété mobile se resserre constamment, et celui de la terre et de l’homme qui la cultive s’élargit de plus en plus à mesure que le premier se resserre, le pouvoir d’interposition diminue constamment. — La quantité d’objets exposés à être arrêtés dans leur trajet du producteur au consommateur entre en proportion constamment décroissante avec la production. À mesure que celle-ci augmente, le producteur gagne constamment et rapidement en pouvoir de traiter avec ceux qui font fonction de gouvernants. — Cet accroissement de pouvoir se manifeste par un effort constant et régulier pour écarter les obstacles qui obstruent la voie du commerce.

Que telle a été la marche des choses dans toutes les sociétés en progrès, nous le voyons par ce qui s’est passé dans l’Attique à partir de l’époque de Thésée jusqu’à celle de Solon, où tant de milliers d’hommes s’affranchirent de toute nécessité de porter à des maîtres le produit de leur travail — et purent se livrer librement aux échanges ; nous le voyons de nouveau dans ce qui s’est passé en Angleterre à partir de l’époque où les Plantagenets achetaient et vendaient la laine, — falsifiaient les monnaies, — où l’on ne trouvait pas d’autre moyen d’imposer la terre que de s’opposer à ce qu’elle passât de main en main en imaginant les lettres de provision, la tutelle, les lois sur l’aliénation et d’autres mesures semblables, jusqu’à l’établissement, en 1692, d’une taxe spéciale sur chaque livre de rente payée au propriétaire. — En France, dans les temps féodaux nous trouvons la terre exempte de tout impôt, — néanmoins le serf qui la cultive est sujet à des contributions de service personnel de toute sorte, et toute sa production est taxée à chaque pas dans le trajet de la terre sur laquelle la production s’est opérée à la personne du consommateur. Arrivons à la Révolu-