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un fait qui aurait dû être connu de tous les économistes qui depuis plusieurs années ont pris à tâche de démontrer la doctrine malthusienne, en prônant que le travailleur d’aujourd’hui a moins pour subsister que celui de l’époque des Plantagenets et des Lancastres. Il est difficile de penser plus loin l’absurde, qu’on ne l’a fait dans certains raisonnements, à propos de cette question.

En comparant les rentes de l’époque actuelle avec celles du temps d’Arthur Young (1770), la Revue d’Édimbourg[1] montre que, dans la période qui les sépare, le prix moyen par acre payé à Bedford et Norfolk, s’est élevé de 11 shilling., 9 deniers à 25 shilling. 3 deniers ; mais que dans la même période, on a réalisé différentes économies dans la culture qui montent à 32 shilling. 2 deniers, — c’est-à-dire à plus du double de l’élévation de la rente. La différence entre les deux va au fermier, et c’est une bonne addition à ses profits. Il faut ajouter à ces économies les grands avantages qui résultent de la création d’un marché domestique qui met le fermier à même de faire deux fois plus de fourrages verts, de laitage, de viande et de laine que n’en faisait son prédécesseur.

Ce sont là d’immenses avantages, et si, dans de telles conditions la terre et le travail ne gagnent pas en valeur, cela doit tenir à quelque erreur dans le système. Et il est facile de le voir. À l’époque de Smith et de Young, les travailleurs, pour la plupart, cultivaient leur propre petite propriété. Depuis, la terre s’est consolidée de plus en plus, d’où est venue la nécessité qu’une classe de grands fermiers s’interposât et fut supportée par celui qui possède la terre et par les bras qui la travaillent. La récolte étant le fond sur lequel se payent les salaires, la rente et les profits, plus ces derniers prélèvent, et moins il reste à partager entre les autres. L’élévation et le taux de la quotité des profits, nous dit l’auteur de l’article de la revue, est la véritable raison qui fait que la terre ne gagne pas en valeur, et que le pouvoir de production du travailleur fermier va décroissant, tandis que dans le cours naturel des choses, il devrait s’accroître. La tendance récente dans toute l’Angleterre, en ce qui regarde la terre, a été rétrograde, et c’est pourquoi ses économistes se sont presque tous ingéniés si fort à fournir des lois naturelles, en vertu desquelles il devienne possible d’im-

  1. Juillet 1852.