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rectement opposé à celui dont nous sommes partis ; rien d’étonnant de voir qu’il arrive à une distribution toute contraire à celle que nous venons d’exposer, et également en opposition avec tous les faits que présente l’histoire de l’origine et de la marche de la rente, dans tous les siècles à dater de Charlemagne. Ses doctrines ramenées à leur forme la plus simple sont contenues dans les propositions suivantes :

1o Qu’à l’origine de l’agriculture, la population était peu nombreuse et la terre abondante, on se contenta de cultiver les sols qui, grâce à leurs propriétés, payaient largement le travail — une certaine somme d’efforts étant rémunérée par cent quarters de blé.

2o Que la terre devenant moins abondante à mesure que la population devenait plus dense, on se trouva dans la nécessité de cultiver les sols moins fertiles, — de s’attaquer successivement à ceux de seconde, de troisième, de quatrième qualité qui donnent respectivement quatre-vingt-dix, quatre-vingts, soixante quarters pour une même somme d’efforts.

3o Qu’avec la nécessité croissante d’appliquer le travail de moins en moins productivement, la rente s’élève. — Le propriétaire du no 1 se trouvant à même de demander et d’obtenir dix quarters du moment où l’on s’est attaqué au no 2, vingt quarters lorsqu’on a passé au no 3, — et trente quarters lorsqu’il a fallu descendre au no 4.

4o Que la proportion, la quote-part du propriétaire, tend ainsi constamment à s’accroître, à mesure que décroît la productivité du travail, — le partage s’effectuant comme il suit :

Total.     Travail. Rente.
A la première époque lorsque le no 1 est seul cultivé 100 100   00
Seconde. no 1 et 2 sont cultivés. 190 180   10
Troisième no 1 à 3 270 240   30
Quatrième no 1 à 4 340 280   60
Cinquième no 1 à 5 400 300 100
Sixième no 1 à 6 450 300 150
Septième no 1 à 7 490 280 210

D’où résulterait une tendance à l’absorption finale de toute la production par le propriétaire de la terre et à une inégalité toujours croissante des conditions — le pouvoir du travailleur de con-