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§ 5. — Il voit juste lorsqu’il affirme qu’il n’y a point à craindre de balance défavorable du négoce pour tout pays qui « conserve avec soin sa population et ses manufactures. »

En un point, toutefois, M. Hume est dans le vrai. Un gouvernement, selon lui, n’a rien à craindre d’une balance défavorable du négoce, « s’il préserve avec soin sa population et ses manufactures. » Ce faisant, il peut en ce qui concerne sa monnaie, « se fier en sûreté au cours des affaires humaines, sans crainte et sans jalousie. » Nous en avons la preuve dans l’exemple de l’Angleterre du siècle dernier, dans celui de la France, dans ceux de tous les pays du nord de l’Europe d’aujourd’hui ; et dans celui des États-Unis chaque fois que leur politique a tendu à favoriser l’association, — à diversifier les emplois, — à développer les pouvoirs de la terre et des hommes qui la cultivent, — à créer un marché domestique, — et à soulager le fermier de la plus oppressive de toutes les taxes, la taxe du transport. Soigneux « pour leur population et leurs manufactures » ils ont alors, et seulement alors, eu en leur faveur une balance du négoce fermement croissante, accompagnée d’une prospérité telle qu’on n’avait jamais connue.

§ 6. — Concordance générale entre les vues de Hume et d’Adam Smith.

En matière de monnaie, ADAM SMITH a suivi de près les traces de M. Hume, — soutenant avec lui que la monnaie ne forme qu’une petite partie du capital d’une nation, « et toujours la partie dont elle tire le moins de profit[1]. »

C’est néanmoins l’utilité que tous les hommes cherchent à se procurer, que toutes les nations ont joie de recevoir et que toutes ont regret de voir partir, — le sens commun de l’humanité et la théorie des économistes étant ainsi les deux pôles opposés. Qui a raison ? Pour répondre à la question, que le lecteur veuille bien calculer le montant d’échanges facilité par une flotte qui pourra avoir coûté dix ou vingt millions de dollars et qu’il le compare avec ceux effectués au moyen d’une simple somme de cent mille dollars en piécettes de trois, cinq ou dix cents, — et il trouvera que la dernière fait plus de besogne en un mois que la flotte n’en pourrait faire dans une année, pour ne pas dire dans des années. Dans l’opinion du Dr Smith, néanmoins, « la monnaie d’or et d’argent qui circule dans tout pays, et au moyen de laquelle la production de sa terre et de son travail circule et se distribue aux consommateurs est tout un capital mort[2]. « Selon lui, lorsqu’ils tombent à meilleur marché, » ils

  1. Richesse des Nations.
  2. Ibid.