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la moins coûteuse, la plus utile et la plus stable de toutes les circulations du monde. Plus la liberté est parfaite, plus forte est la tendance à la stabilité, et moins il en coûte, comme on en a la preuve en passant des États du Sud et de l’Ouest, vers ceux du Nord et de l’Ouest[1].

§ 6. — La fermeté dans sa valeur propre est le desideratum d’une circulation. Tendance du système américain dans ce sens.

Ce qui est surtout à désirer dans un système de circulation c’est la fermeté dans sa propre valeur, — qui en fasse une mesure des changements dans la valeur des autres choses. C’est le cas pour les mesures de pesanteur et de longueur, comme le prouve abondamment le soin extrême avec lequel on a cherché à se pourvoir d’un étalon auquel rapporter toutes les aunes, tous les poids, et tous les autres instruments qui s’emploient pour déterminer les quantités de drap, fer, sucre, coton et autres articles qui passent de main en main. Que les aunes viennent à varier en longueur, ou que les poids d’une livre viennent à peser les uns seize onces, les autres douze, ils perdront toute leur utilité, — employés seulement par ceux qui désirent acheter à la longue mesure et vendre à la courte, — et qui par là s’enrichissent aux dépens de leurs voisins sans méfiance. De quelle importance presque infiniment plus grande doit donc être le besoin de fermeté dans l’instrument au moyen duquel nous comparons les valeurs de la terre, du travail, des maisons, des navires, du sucre, coton, tabac, et autres utilités et objets ! C’est la quantité essentielle d’une circulation, et l’avantage résultant

  1. La liberté de nom ou de fait sont deux choses fort différentes. La première se trouve en New-England ; quant à la centralisation en guise de liberté, nous devons nous adresser à New-York, dont le système libre nominalement a été très-justement caractérisé par un éminent économiste italien, dans le passage suivant. — « Voici des faits qui montrent clairement l’influence que de pures mots peuvent avoir pour créer et répandre des opinions. En 1838, New-York prit les devants pour le rappel des lois alors existantes, qui exigeaient l’autorisation préliminaire de la législature pour la création des banques — y substituant un système général en vertu duquel tous ceux qui le désirent peuvent fonder de tels établissements ; et son exemple a depuis été suivi dans d’autres États. Le système reçut le nom de « free banking » titre qu’il méritait peu, — puisque aux banques formées d’après lui, il est défendu d’émettre des notes au-delà d’une certaine somme, proportionnelle à leurs capitaux respectifs ; et que toutes les notes doivent être garanties par un dépôt de valeurs dans les mains du contrôleur des finances de l’État. Les libres banques — comme on les appelle — sont ainsi régies par une loi très-analogue à celle de sir Robert Peel — avec, en outre, quelques inconvénients à elles propres, que je ne puis détailler ici. On n’en attribue pas moins tous les désordres des libres banques, à une liberté qui, comme on le voit, n’existe point réellement. » — Giulio : La Banca ed il Tesoro, p. 102, Turin, 1853.