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Ces métaux se recommandent on ne peut mieux pour une telle fin. Disséminés par quantités faibles sur la surface de la terre, et exigeant beaucoup de travail pour les recueillir, — ils représentent un grand montant de valeur, — et cela sous peu de volume, ce qui les rend d’une garde facile et sûre, et aisés à transporter d’un lieu à l’autre. Non sujets à la rouille ni à s’endommager, ils se conservent intacts pour un temps illimité ; leur quantité est par conséquent beaucoup moins sujette à varier que celle du blé ou du grain, dont les quantités dépendent tellement des intempéries des saisons, et qui ne peuvent se conserver que pour un certain temps. Susceptibles d’être divisés à l’infini, on peut s’en servir pour les plus petits échanges comme pour les plus considérables ; et personne n’ignore quel commerce se fait au moyen des pièces d’un cent et de trois cents, qui ne se pourrait faire, si l’on ne se servait pas de pièces au-dessous de cinq, de six et de dix cents.

Pour faciliter leur usage, les diverses communautés du monde ont coutume de découper ces métaux en petites pièces d’un certain poids, et puis de les marquer d’une empreinte qui permet à chacun de reconnaître combien d’or et d’argent on lui offre en échange contre l’utilité qu’il veut vendre ; mais l’opération du monnayage n’ajoute qu’une valeur presque insignifiante à la pièce[1]. Dans les premiers âges de société, tous les métaux passaient en lingots, que naturellement on devait peser, et cela se pratique encore pour l’or qui passe entre l’Amérique et l’Europe. La poussière d’or se pèse aussi, et l’on a quelque chose à déduire pour les impuretés qui s’y trouvent mêlées à l’or lui-même ; mais sauf cela, elle a même valeur à très-peu près que l’or qui sort de la monnaie, avec l’empreinte d’une aigle, d’une tête de Victoria ou de Nicolas.

§ 2. — Faculté d’association et de combinaison, résultat de l’usage de la monnaie. De toutes les machines en usage parmi les hommes, il n’en est pas qui économise davantage l’effort humain. Elle est au corps social ce que l’air atmosphérique est au corps physique, — tous deux fournissent l’outillage de circulation.

Au moyen d’une quantité convenable d’or et d’argent, le tout divisé, pesé, marqué d’une empreinte, voici le fermier, le meunier, le drapier et tous les autres membres de la société mis en mesure d’effectuer des échanges, même au point d’acheter pour un simple cent leur part des travaux de milliers et de dizaine de milliers

  1. Le monceau de papier dans l’usine gagne quelque peu en valeur lorsqu’il a été compté et mis en rames ; et la masse de drap gagne de la même manière après qu’elle a été mesurée et mise par pièces — par la raison que tous deux sont mieux préparés pour en faciliter l’échange. Il en est précisément de même pour l’accroissement de valeur qui résulte de l’opération du monnayage.