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placer près de ceux qui cultivent la canne à sucre et de ceux qui produisent le blé.

En même temps que se développent la richesse et la puissance, il y a donc accroissement dans la faculté d’entretenir le commerce avec des individus à des distances éloignées. Mais plus il y a de richesse, plus il se fait d’efforts considérables pour étendre le commerce à l’intérieur. À mesure que la puissance productive de la terre se développe, de nouveaux produits se naturalisent ; partout le froment remplace le seigle, le seigle l’avoine ; le mûrier remplace le chêne, et le ver à soie le porc qui vivait des fruits du chêne. La pomme de terre passe des régions de l’Ouest à celle de l’Est, et la pêche, de l’Est à l’Ouest ; la chèvre de Cachemire se naturalise dans la Caroline et l’alpaga est transporté sur les collines de la France ; chaque changement qui s’opère ainsi tend à supprimer le temps et l’espace entre le producteur et le consommateur ; et le résultat est une diminution dans la proportion du travail que l’homme doit consacrer à opérer les changements de lieu, et un accroissement dans celle qu’il peut appliquer à augmenter la quantité et à améliorer la qualité des produits de la terre[1].

§ 11. — Caractère chanceux du travail rural quand le marché est distant. Diminution des risques par suite du rapprochement du consommateur et du producteur.

La fixité et la régularité augmentent avec l’accroissement

  1. La civilisation nous procure la vue d’un nombre incroyable de végétaux que, sans elle, nous ne verrions jamais dans nos demeures. Sans la civilisation nous verrions assurément des hêtres ou des chênes plus beaux peut-être que ceux d’aujourd’hui ; mais ni le sapin, ou le pin, ni le mélèze, ni l’acacia et le platane ; nous aurions à la vérité des buissons d’aubépine et de coudrier, mais non les arbustes et les buissons fleuris qui embellissent aujourd’hui nos jardins d’agrément. Nous ne verrions pas les pêchers ou les abricotiers en fleurs et les fruits qu’ils produisent ; nous serions privés de toute une immense Flore étrangère qui réjouit nos regards et nous crée tant de jouissances, produit une si grande variété dans nos jardins et dans l’intérieur de nos maisons, sans parler de nos serres qui donnent, pour le moins, une idée imparfaite de la végétation des tropiques.
        En outre, la variété infinie qui se manifeste dans les races et dans les espèces diverses, n’existerait pas sans la culture. Nous ne pourrions récréer notre vue par la série infinie des roses ; il faudrait nous contenter de la simple rose sauvage ; la giroflée, le dahlia, l’aster et l’oreille d’ours, avec leurs innombrables variétés, nous seraient inconnus. Et personne ne niera la beauté de ces objets, personne ne viendra affirmer qu’elles ne sont point des beautés de la nature. Sur ce point, j’aurai pour moi, à tout prendre, le peintre de fleurs et les dames. Sans la culture, nous ne posséderions point les belles variétés de fruits, tels que la pomme ; car la misérable pomme sauvage des bois serait notre seul fruit de ce genre. Cette vérité reste applicable aux animaux ; un beau cheval arabe, de jolies races de pigeons sont assurément des beautés naturelles. (Schow. La Terre, les Plantes et l’Homme.)