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veloppement des forces productrices de la terre, en même temps qu’a lieu un accroissement correspondant des forces perturbatrices auxquelles nous avons fait allusion plus haut. C’est alors que l’agriculture, cessant d’être une science, passe aux mains des esclaves, ainsi que nous le voyons aux temps passés, en relisant l’histoire de la Grèce et de l’Italie, et de nos jours en Portugal, en Turquie, dans les Carolines et dans l’Inde. Sans différence de travaux il ne peut exister ni association ni commerce ; et sans la diversité des travaux, il ne peut exister d’autres différences que celles que nous avons constatées aux premiers âges de la société encore à l’état de barbarie. Que les différences existent et que le commerce se développe, et l’on verra la valeur des denrées diminuer constamment, avec un accroissement correspondant dans l’utilité des matières dont se composent ces denrées et dans la valeur et la liberté de l’homme.

L’artisan, ayant à vendre un travail fait avec talent, obtient un salaire élevé ; tandis que l’individu qui cultive la terre ne peut offrir à l’acheteur qu’un travail fait grossièrement et se trouve partout, presque complètement, sinon tout à fait esclave ; et cependant, l’occupation qui exige le plus haut degré de connaissances et qui récompense le mieux celui qui les possède, c’est le travail agricole. La raison d’un pareil état de choses dans le passé et aujourd’hui, presque en tout pays, c’est que la politique adoptée a favorisé l’établissement de la centralisation et la consolidation du pouvoir dans les grandes villes, tandis qu’elle s’est montrée hostile à la création des centres locaux nécessaires pour l’entretien du commerce.

§ 9. — Le fermier voisin du marché crée toujours une machine, celui qui en est éloigné en détruit toujours une. Pour l’un, le travail et ses produits vont de jour en jour s’économisant davantage. Pour l’autre la déperdition s’accroît de jour en jour ; — la marche de l’homme, n’importe dans quelle direction, est une marche en accélération constante.

L’agriculteur habile fabrique perpétuellement une machine, utilisant des matières qui jusqu’alors n’avaient pas été mises à profit pour les desseins de l’homme ; et la somme des utilités ainsi développées se retrouve dans le revenu plus considérable qu’il recueille de son travail, et dans l’augmentation de valeur de la terre. En labourant plus profondément, il arrive à produire ce résultat, que les couches superficielles et les couches inférieures du sol se combinent entre elles ; et plus la combinaison est intime, plus la récompense de ses efforts est considérable. En drainant sa terre, il permet à l’eau de la pénétrer rapidement, et le résultat se traduit en accroissement considérable de ses récoltes. Un jour il la marne