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dans le pays un afflux constant de marchandises anglaises, et l’or russe s’écoulait au dehors, et le gouvernement était paralysé, en même temps que les fabriques étaient ruinées. Ce fut dans cet état de choses que le comte Nesselrode émit une circulaire pour préparer à un changement. On y déclarait que la Russie se trouvait forcée de recourir à un système de commerce indépendant ; que les produits de l’empire ne trouvaient plus de marchés au dehors ; que les fabriques nationales étaient au plus bas ; que la monnaie du pays s’écoulait rapidement chez les nations éloignées ; que les plus solides maisons de commerce étaient en danger, et que l’agriculture et le commerce, aussi bien que l’industrie manufacturière, étaient « non-seulement paralysées, mais touchaient à leur ruine. »

L’année 1824 vit inaugurer le nouveau système — système visant à accroître le pouvoir d’association et de combinaison par tout l’empire, et en harmonie parfaite avec celui établi en France par Colbert, et qui s’y est continué jusqu’à ce jour. Commerce et manufactures se reprirent à fleurir, et, dès l’année 1834, le drap russe était pris par les caravanes pour les foires d’Asie. Depuis lors le progrès a été tel, que les marchés de l’Asie centrale sont alimentés surtout par les produits des métiers russes. Dans l’Afghanistan et dans la Chine, ils vont supplantant rapidement les draps anglais, nonobstant que les derniers ont l’avantage du transport ; tandis qu’en Tartarie et dans la Russie elle-même on parle rarement des laines anglaises. De 1812 à 1829, on constata que le nombre des usines avait triplé, et que, de tous les produits de fabrique consommés dans le pays, le sixième seulement était de provenance étrangère. Depuis lors l’accroissement industriel a été très rapide.

    au contraire, outre qu’ils emploient tant de bras dans leurs ateliers, sont des instruments non-seulement de richesse, mais de maintien du bon ordre dans la contrée environnante. Ainsi, leurs capitaux et leurs occupations vivifient et accroissent l’industrie nationale à un plus haut degré que ceux du marchand. — Ils servent même à accroître le nombre des marchands, car partout où se fondent des fabriques et manufactures, les marchands aussi apparaissent à l’instant. Ace compte même, donc — c’est-à-dire parce qu’ils amènent les marchands autour d’eux — les fabricants sont avantageux au paysan, qui par là voit s’étendre la vente de ses produits. — Sans les commerçants et les fabricants, la civilisation serait retardée et tous les liens de la vie sociale relâchés. Les capitales et toutes les autres grandes villes ne sont pas riches de leurs magasins de farine, d’avoine ou de chanvre ; mais lorsque leurs boutiques sont remplies des produits manufacturés et des raffinements des arts. » — Mordvinoff. Les Manufactures et le Tarif. St-Pétersbourg, 1815.