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richesse ; et conséquemment c’est alors qu’on verrait un intérêt personnel éclairé pousser tous les hommes à apporter, dans le maniement des affaires publiques, le même esprit qui devrait animer tout chrétien dans ses rapports avec ses semblables.

Tel n’a pas été, et très malheureusement, l’esprit dans lequel a été dirigée la politique anglaise. Purement égoïste elle a cherché à anéantir partout le commerce, et à lui substituer partout le trafic ; par ce moyen, diminuant la valeur de l’homme, augmentant la valeur de toutes les denrées dont il avait besoin pour ses desseins, arrêtant le développement de son intelligence, l’empêchant d’obtenir le pouvoir sur les forces de la nature, et le maintenant ainsi dans cet état de pauvreté qui en fait un simple instrument entre les mains du soldat et du trafiquant. C’est pour accomplir ces desseins que le monde entier a été entouré d’une ceinture de colonies, que des alliances ont été conclues et brisées, que des milliards de liv. sterl. ont été dépensés en guerres ruineuses[1], que des milliards d’existences humaines ont été sacrifiés ; et le résultat peut se constater dans ce fait, qu’aujourd’hui elle reste seule debout sur les ruines, qu’elle a faites elle-même.

Comme elle a arrêté le mouvement de la Société en Portugal, son ancien et fidèle allié, lui est maintenant à charge et devient inutile même pour les besoins du trafic anglais. Il en est de même à l’égard de la Turquie et des Indes orientales et occidentales qui toutes deux sont des sources d’inquiétude et non de profit. Si nous nous rapprochons de l’Angleterre elle-même, l’Irlande — pays qui pos-

  1. « Tout rocher dans l’Océan où peut se percher un cormoran est occupé par des troupes anglaises et possède un gouverneur, un vice-gouverneur, un garde-magasin et un garde-magasin adjoint et possédera bientôt un archidiacre et un évêque, des collèges militaires pourvus de 34 professeurs, chargés de l’éducation de 17 enseignes par an, ce qui fait une moitié d’enseigne par professeur ; et, en outre, toute espèce d’absurdité… Une guerre juste et nécessaire coûte à ce pays (l’Angleterre), à peu près cent mille livres par minute ; un fouet, quinze mille livres, et un ruban sept mille livres ; le galon pour les tambours et les fifres, neuf mille livres ; une pension pour un individu qui s’est fait casser la tête sous le pôle, — pour un autre qui a eu la jambe cassée sous l’équateur ; des subsides à allouer à la Perse, des fonds secrets pour le Thibet ; une rente annuelle à lady n’importe qui et à ses sept filles, dont le mari a été blessé en quelque lieu où nous ne devons jamais avoir eu de soldats le moins du monde, et le frère aîné renvoyant quatre autres frères au Parlement ; un tel tableau de folie, de corruption et de prodigalité doit paralyser l’activité et détruire la fortune du peuple le plus industrieux et le plus courageux qui ait jamais existé. » (Sidney Smith.)