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ture. Pendant plusieurs siècles, le courant des matières premières s’était porté vers le continent ; mais aujourd’hui il fallait changer la direction de ce courant ; atteindre ce but était une œuvre qui exigeait de sérieux efforts ; d’ailleurs, le commerce, en Angleterre, était entravé par de nombreuses mesures restrictives, dont la plupart avaient été créées par la loi, tandis que d’autres résultaient de la préoccupation des manufacturiers existants, de décourager la concurrence intérieure, pour l’achat des matières premières aussi bien que pour la vente des produits achevés. Alors, comme aujourd’hui, ils voulaient acheter à bon marché et vendre cher ; et plus ils pouvaient empêcher le développement des manufactures à l’intérieur, plus la laine était à bas prix, et plus le drap se vendait cher.

Le temps cependant amena des changements, mais non pas avant que le fermier anglais eût éprouvé, dans son plein et entier effet, la perte qu’entraîne la nécessité de dépendre de marchés éloignés pour la vente des produits bruts de la terre. Dans la longue période de guerre qui se termina par le traité d’Utrecht, la faculté d’échanger du blé contre de l’argent était équivalente à 43 schell. 6 pence par quarter ; mais avec le retour de la paix (1713), le prix tomba à 35 schell. ; puis il continua graduellement à baisser jusqu’au moment où, dans la période des dix années expirant en 1755, le prix moyen ne fut plus que de 21 schell. 3 pence, c’est-à-dire inférieur, de plus de moitié, au prix qu’on en obtenait auparavant. Le produit excédant la consommation, une petite portion devait, nécessairement, être exportée ; et il sera évident, pour tous ceux qui remarquent la marche des affaires commerciales, que le prix obtenu pour l’excédant détermina celui de la récolte tout entière. Un déficit, dans la proportion même de cent mille boisseaux, fait hausser le prix de la totalité de ces mêmes boisseaux au niveau du prix auquel cette petite quantité peut être importée d’un marché éloigné ; tandis qu’un excédant, dans cette même proportion, réduit la totalité au niveau du prix auquel cette quantité insignifiante doit se vendre. On verra, par les chiffres suivants, combien était faible l’excédant auquel était due la baisse considérable qui avait eu lieu :