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la direction inverse. Le développement de la civilisation est signalé par un accroissement dans la sécurité des individus et des propriétés ; et cet accroissement, nous le constatons, en quittant les anciennes possessions de la Compagnie, et pénétrant dans celles qu’elle a nouvellement acquises[1]. Les crimes de toute espèce, le vol par bandes, le parjure, le crime de faux, sont très-fréquents dans le Bengale et à Madras, et la pauvreté du cultivateur y est arrivée à de telles extrémités que l’impôt y est le moins considérable et ne se perçoit qu’avec le plus grande difficulté ; et c’est aussi dans ces résidences que la puissance d’association a été anéantie le plus efficacement. Si nous passons dans les provinces du Nord-Ouest, acquises plus récemment, les personnes et les propriétés y trouvent une sécurité relative et le revenu de l’impôt augmente ; mais lorsque nous atteignons le Punjab, — tout récemment encore, soumis à la domination de Runjeet Singh et de ses successeurs, — nous constatons que, bien qu’on nous les ait représentés comme des tyrans, les agglomérations formant les villages et le système d’association si bien conçu y sont demeurés intacts. Là des fonctionnaires de toute sorte ont une plus grande responsabilité, par rapport à l’accomplissement de leurs devoirs, que leurs collègues dans les provinces plus anciennes ; la propriété et l’individu y jouissent d’une plus grande sécurité que dans le reste de l’Inde. Le vol par bandes y est rare, le parjure peu fréquent ; et ainsi que N. Campbell l’assure à ses lecteurs, un serment solennel « lie d’une façon étonnante. » « Plus il y a longtemps que nous possédons une province, continue-t-il, plus le parjure y devient commun et général ; et plus se fortifie, conséquemment, la preuve de ce fait, que le sentiment de responsabilité envers Dieu et l’homme diminue, en même temps que l’individualité et la puissance d’association. Ce sentiment s’accroît partout avec le pouvoir d’entretenir le commerce, et il décroît partout, à mesure que l’homme devient un pur instrument dont se sert le trafic. Les peuplades des parties élevées de l’Inde se font remarquer par leur véracité rigoureuse ; dans les villages on entend aussi peu parler de mensonge, dit le colonel Sleeman, que dans aucune autre partie du monde, sur une étendue de terrain et avec une population égales[2]. »

  1. Voy. Campbell. L'Inde moderne., chap ix.
  2. Excursions dans l'Inde, t. II, p. 109.