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de produits achevés qu’ils ont la faculté d’acheter est tellement faible, que le prix payé pour le transport de ces produits forme à peine une compensation pour les hommes, les bœufs, les chariots et les navires indispensables à l’accomplissement de cette œuvre. Presque tout le fardeau du double voyage est donc supporté par la matière première ; et de même qu’en Turquie, en Portugal, en Irlande et dans tous les autres pays agricoles, la difficulté de créer de nouvelles routes, ou d’entretenir les anciennes, augmente d’année en année.

Le transport des provenances des districts importants pour la culture du coton s’effectue à raison de sept milles par journée, et ce transport exige plus de cent journées. « Et si le troupeau de bœufs est surpris par la pluie, le coton, saturé d’humidité, devient lourd, et le terrain noir argileux, qui constitue le parcours de toute la route, s’enfonce sous les pieds de l’homme, au-dessus de la cheville, et sous les pieds du bœuf chargé, jusqu’aux genoux. Dans une pareille situation, le chargement de coton reste quelquefois des semaines entières sur le sol, et le négociant se trouve ruiné[1]. »

Les moyens de communication existants avec l’intérieur, dit un autre écrivain, sont tellement pitoyables « qu’on laisse souvent se perdre un grand nombre d’articles de produit, faute de moyens de transport et d’un marché, tandis que le prix de ceux qui ont pu parvenir jusqu’au port a haussé d’une façon exorbitante ; mais la quantité ne s’est pas élevée à plus de 20 % de la totalité du produit, le reste des articles ayant constamment subi une détérioration considérable. »

Avec de tels modes de transport, on peut comprendre sans peine comment il se fait que le coton ne rapporte au cultivateur qu’un penny par livre, et comment aussi le producteur de substances plus encombrantes se trouve dans une situation qui empire même encore, aujourd’hui que le consommateur placé près de lui a disparu. Lorsque la récolte est abondante, on peut à peine trouver un prix quelconque pour le blé[2], et lorsqu’elle est faible, la population

  1. L’Économiste de Londres.
  2. « En 1846 ou 1847, le collecteur fut obligé d’accorder remise de la taxe foncière, parce que l’abondance des années antérieures avait amené la stagnation dans la province, et que les bas prix du blé résultant de cette cause empêchaient