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9 pence (66 cents), comme salaire hebdomadaire. Le but qu’on voulait atteindre, était de faire travailler à plus bas prix que le pauvre Hindou, et de lui interdire le marché du monde, puis de lui interdire son propre marché. La manière d’atteindre ce but consistait à diminuer la valeur du travail, le travailleur, suivant les doctrines modernes, n’étant qu’un instrument dont le trafic doit faire usage.

Avec la décadence des manufactures de l’Inde, la demande des services des femmes et des enfants a cessé, et ils sont forcés ou de rester inactifs, ou de chercher du travail dans les champs ; et c’est ici que nous avons un des symptômes caractéristiques de la rétrogradation vers la servitude et la barbarie. Les hommes qui avaient été accoutumés à remplir les intervalles d’autres travaux, par des occupations se rattachant à la fabrication des tissus de coton, furent également contraints de se transporter aux champs, toute demande de travail physique et intellectuel ayant cessé, si ce n’est autant qu’il était indispensable pour la production de l’indigo, de la canne à sucre, du coton ou du riz. Il ne leur était pas même permis de trier cette dernière substance ; on le leur avait interdit par un droit deux fois plus considérable que celui qu’on acquittait sur le riz en grain, lors de son importation en Angleterre. Le cultivateur de coton, après avoir payé au gouvernement[1] 78 % sur le produit de son travail, se voyait enlever la faculté de trafiquer directement avec le tisserand, et forcé de soutenir « une concurrence illimitée » contre les machines mieux fabriquées et le travail presque complètement libre d’impôts de nos États du Sud, se trouvant ainsi soumis « aux variations mystérieuses des marchés étrangers, » où la fièvre de la spéculation était suivie du refroidissement de la réaction, et cela avec une rapidité si fréquente qu’elle mettait tout calcul à néant. Si les récoltes américaines étaient faibles, les acheteurs enlevaient le coton ; mais si elles étaient abondantes, l’article indien n’était plus que de la

  1. « En prenant dans une période de treize années, les six dernières, le prix du coton a été de 2 pence la livre, et si le produit d’un beegah était de 6 schell. 6 pence, sur cette somme le gouvernement prélevait 68%, du produit brut ; et en prenant les deux années 1841 et 1842, le prix du coton était de 1 penny 3/4 la livre et le produit d’un beegah était de 5 schell. 8 pence. D’après ces données, l’impôt établi était réellement équivalent à 78 % sur le produit brut de la terre. » (Discours de M. Bright à la chambre des communes.)