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croissante de la force humaine intellectuelle et physique ; et la force ainsi économisée, à un certain moment, a constitué le capital à employer dans le moment qui a suivi. Plus cette économie a été considérable, plus l’a été également le pouvoir de se procurer de nouvelles machines à l’aide desquelles on a obtenu un empire plus étendu sur la nature ; l’eau, le vent, la vapeur et l’électricité ont été forcés d’accomplir l’œuvre qui, jusqu’à ce jour, avait exigé l’effort des bras humains. A mesure que le progrès a diminué, et que les différences parmi les individus sont devenues moins nombreuses, l’individualité a diminué, en même temps qu’il y a eu accroissement constant dans la déperdition de la force humaine, chaque pas dans cette voie n’étant que le prélude d’un nouveau pas plus considérable. Quand les usines se sont arrêtées et que les manufactures ont décliné, les individus qui y avaient travaillé ont été contraints de chercher au dehors les moyens de subsistance qui leur étaient refusés à l’intérieur. Avec la diminution de la population, a diminué le pouvoir d’entretenir les routes et les ponts ; et lorsque les ponts ont disparu, les terres fertiles ont été abandonnées. La Malaria ne tardant pas à décimer la population disséminée qui reste encore, nous constatons, avec chaque phase du progrès, une diminution dans la quantité des denrées produites, accompagnée d’une augmentation dans les obstacles placés entre le producteur et le marché où il peut vendre ses produits ; augmentation qui exige, pour être annulée, une proportion constamment croissante d’efforts, et qui permet au voiturier et au trafiquant de s’enrichir aux dépens des pauvres individus qui veulent encore cultiver la terre. C’est ainsi que le trafic tend d’une façon aussi certaine à l’esclavage que le commerce à la liberté.

Dans les intérêts réels et permanents des nations il n’existe point de discordances. Tout ce qui tend au préjudice de l’une tend également au préjudice de l’autre, et le jour viendra peut-être où l’on admettra qu’il en est ainsi ; et où l’on admettra également que, parmi les nations de même que parmi les individus, un intérêt personnel éclairé impose l’observation constante de cette règle si précieuse, base même du christianisme : Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fît à toi-même ! Il n’y a qu’un siècle, la Turquie, le Portugal et les Antilles étaient pour l’Angleterre les acheteurs les plus avantageux entre tous, les pays avec