Page:Carey - Principes de la science sociale, Tome 1.djvu/335

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dix millions d’individus tout ce qui leur est nécessaire, tout ce qui peut contribuer au bien-être, à la commodité et aux jouissances de la vie, est le même qui, à l’époque où la terre surabondante n’était occupée que par dix mille, donnait à ce nombre si restreint d’individus de maigres quantités de la plus misérable nourriture, si maigres que les famines étaient fréquentes et suivies dans leurs ravages de la peste qui, à de courts intervalles, enlevait la population des petits établissements disséminés sur les hauteurs.

Nous constatons ici le mouvement constamment plus rapide de la société, et l’accroissement du commerce résultant d’une diminution constante dans la part proportionnelle du travail social, nécessaire pour effectuer les changements de lieu ; diminution qui a lieu par suite d’un accroissement constant dans la puissance d’association et dans le développement de l’individualité, résultant de la diversité des travaux. A mesure que le village grandit et peut plus facilement se suffire à lui-même, il lui devient possible d’améliorer ses communications avec les villages voisins ; et bientôt tous sont en état d’effectuer des améliorations dans les routes qui conduisent à la ville plus éloignée. A mesure que le travail se diversifie davantage dans la ville, celle-ci peut associer ses efforts à ceux des villes voisines pour réaliser des améliorations dans le transport à la cité plus éloignée ; et à mesure que les cités grandissent, elles peuvent pareillement s’unir pour faciliter les relations avec les nations éloignées. Le pouvoir d’entretenir le commerce augmente ainsi, avec chaque diminution dans la nécessité d’avoir recours au trafic et au transport des denrées.

§ 3. — Plus le commerce est parfait parmi les hommes, plus est grande la tendance à faire disparaître les obstacles qui subsistent à l’association. Le progrès de l’homme, dans quelque direction que ce soit, suit un mouvement constant d’accélération

La nécessité d’effectuer des changements de lieu, est un obstacle qu’oppose la nature à la satisfaction des désirs de l’homme ; et il était nécessaire que cet obstacle existât afin que ses facultés fussent excitées à faire des efforts pour l’écarter. Ces facultés existent chez tous les hommes, mais elles restent à l’état latent, lorsqu’elles ne sont pas mises en éveil pour agir, par le sentiment de l’avantage qui doit résulter d’un accroissement dans le pouvoir d’entretenir des rapports avec ses semblables. Plus est grande la facilité des relations, plus sont appréciés leurs avantages, et plus devient profonde la conviction de pouvoir réaliser de nouveaux progrès, dans le but de faire disparaître complètement l’obstacle qui s’oppose aux rapports directs et récipro-