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lieu parce que la nature qui travaille gratuitement a été, chaque année, rendue plus apte à faire ce qui se faisait autrefois à l’aide du travail de l’homme ; lequel exige une quantité constante de nourriture et de vêtement pour que la machine soit maintenue en état d’accomplir son œuvre.

§ 6. — Inconséquences d’Adam Smith et d’autres économistes relativement à la cause de la valeur. Il n’existe qu’une seule cause pour la valeur de la terre, de toutes ses parties et de tous ses produits. Les phénomènes relatifs à la valeur de la terre se manifestent en Angleterre, aux États-Unis et dans d’autres pays.

« Le travail, dit Adam Smith, a été le premier prix, la monnaie payée pour l’achat primitif de toutes choses. » Et, suivant son opinion, « il constitue la seule mesure définitive et réelle qui puisse servir à apprécier et à comparer la valeur de toutes les marchandises[1]. » En comparant donc le prix payé avec le produit obtenu, le travail serait, d’après cette autorité, l’étalon de la valeur pour toute espèce de denrées, qu’il s’agisse de la terre cultivée elle-même, ou des denrées obtenues en retour du travail appliqué à sa culture. Dans un autre passage, Smith nous dit que le prix payé pour l’usage de la terre « n’est nullement en proportion des améliorations que le propriétaire peut avoir faites sur sa terre, ou de ce qu’il lui suffirait de prendre (pour ne pas perdre), mais bien de ce que le fermier peut consentir à donner, et se trouve donc être naturellement un prix de monopole[2]. » Nous avons là une des causes de la valeur de la terre, en sus du travail appliqué à sa culture ou à son bénéfice ; et c’est ainsi que l’auteur établit, pour elle, une loi complètement différente de celle qui a été proposée comme la cause de la valeur « en toute chose. »

M. Mac Culloch apprend à ses lecteurs « que le travail est la source unique de la richesse, » et que « l’eau, les feuilles des arbres, les peaux des animaux, en un mot tous les produits spontanés de la nature, ne possèdent aucune valeur que celle qu’ils tirent du travail nécessaire pour les approprier à notre usage. Toutefois, continue-t-il, les forces agissantes de la nature peuvent être appropriées ou accaparées par un ou plusieurs individus, à l’exclusion de tous les autres ; et ceux qui accaparent ces forces peuvent exiger un prix pour les services qu’elles rendent. Mais cela démontre-t-il, se demande l’auteur, que ces services coûtent quelque chose aux accapareurs ? Si A possède sur sa propriété une chute d’eau, il pourra probablement en retirer un

  1. Richesse des nations, livre i, chap. 5.
  2. Richesse des nations, livre i, chap. 11.