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une cause de ruine. Si, au lieu de descendre le Mississippi nous remontons le Missouri, le Kentucky, le Tennessee, ou la rivière Rouge, nous constatons invariablement : que plus la population est compacte et plus la masse de richesse est considérable, plus aussi les bons terrains sont cultivés ; qu’à mesure que la population diminue, en même temps que nous nous rapprochons des sources des cours d’eau et que la terre devient plus abondante, la culture s’éloigne du bord des rivières, la quantité de bois et des terres à prairies non drainées augmente, et que les habitants disséminés obtiennent des couches superficielles du sol, une rémunération moins considérable pour leur travail, en même temps que diminue leur pouvoir de se procurer facilement les choses nécessaires à la vie et tout ce qui contribue à leur commodité et à leur bien-être. Si nous traversons le Mississippi pour pénétrer dans le Texas, nous trouvons la ville d’Austin, siège du premier établissement américain, placé sur le Colorado, tandis que des millions d’acres du plus beau bois et des plus belles terres à prairies du monde, complètement inoccupées, ont été négligées, comme ne pouvant rembourser les frais de simple appropriation. Si nous portons nos regards sur la colonie espagnole de Bexar, nous y constaterons une nouvelle démonstration du même fait universel, à savoir la tendance complète de la colonisation à se porter vers les sources des cours d’eau.

Si nous tournons les yeux vers les États atlantiques du sud, nous rencontrons partout la preuve de ce même fait si important. Les plus riches terrains de la Caroline du nord, sur une étendue de plusieurs millions d’acres, ne sont jusqu’à ce jour, ni défrichés ni drainés, tandis qu’on y voit sur tous les autres points des individus dépensant leur labeur sur des terrains peu fertiles qui ne leur rendent que de trois à cinq boisseaux par acre. La Caroline du sud possède des millions d’acres des plus beaux terrains à prairies et autres, susceptibles de donner d’immenses revenus au cultivateur, et qui n’attendent que le développement de la richesse et de la population ; et il en est de même dans la Géorgie, la Floride et l’Alabama. Les terres les plus fertiles de l’ouest, du sud et du sud-ouest, sont tellement dépourvues de valeur que le Congrès en a fait une concession, sur une étendue de près de 40 millions d’acres, aux États dans lesquels elles se trouvent situées, et ceux-ci les ont acceptées.