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légende de la nuit des morts

Leur nombre emplit la plaine entière,
Elles sortent du cimetière
Noyé dans l’horizon brumeux…
Poète, à genoux, ce sont eux.
Ce sont les morts de tous les âges,
Incline-toi sur leur passage !
Au milieu des grands peupliers,
S’avancent les jeunes guerriers,
Les vieillards, les enfants, les vierges,
Leurs fronts ont des clartés de cierge,
Leur hymne est pénétrant et doux.
Celle qui les précède tous
Et les guide vers la colline,
Cette vierge chaste et divine,
C’est la Mort, qu’ils ne craignent pas
Après les suprêmes combats,
Elle a paru calme et sereine,
Comme une jeune souveraine,


Et le poète put la voir :
Elle avait un long manteau noir,
Son front plein de mélancolie
Était ceint de feuilles pâlies,
Une étoile brillait dans ses cheveux épars
Et l’éternelle paix gisait dans ses regards.