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VIE DE MÉLANIE

matin, qu’as-tu mangé avant de partir ? — « Papa, ici, il y a des fruits et je puis en manger partout ; on me l’a permis[1]. » — « Ce n’est pas ce que je te demande. Qu’est-ce qu’on te donne tous les matins avant ton départ, et qu’est-ce qu’on te donne pour manger à midi ? réponds-moi. » — « Papa, mes maîtres sont très occupés ; ils savent que j’ai la permission de manger des fruits partout où je vais, et alors ils oublient de me donner quelque chose. Ce matin ils ne l’ont pas oublié ». — « Et c’est toujours de ce pain qu’ils t’ont donné quand ils ne l’oubliaient pas ? » — « Oh ! non, papa, c’est aujourd’hui la première fois qu’ils m’ont donné du pain. » Et mon père très fâché va chez mes patrons et il y eut grand tapage. Mon père voulait m’emmener à Corps, mes patrons, tous quatre, s’y opposaient et promettaient d’avoir soin de moi. Mon père les crut et s’en alla.

Le temps des moissons étant venu, mes patrons avaient fait avec des gerbes de blé battu, une espèce de cabane dans leur champ, afin de s’y tenir pour garder leur récolte contre

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  1. Mais elle n’en mangeait presque pas. On a vu, cinq pages plus haut, sa conversation avec son ange gardien sur cette « croix de providence » de souffrir la faim.