Page:Calderón - Théâtre, trad. Hinard, tome III.djvu/96

Cette page a été validée par deux contributeurs.
86
LE SECRET À HAUTE VOIX.

laura.

Il est vrai. (À part.) Ah ! si elle savait que, dans sa folle jalousie elle s’est entremise pour ces amants et les a réunis elle-même !


Entre FRÉDÉRIC, et, un peu après, FABIO.
frédéric.

Permettez, madame, que je baise votre main.

la duchesse.

Eh quoi ! Frédéric, vous voilà déjà de retour ?

frédéric.

On va vite, madame, lorsqu’on a du zèle et du dévouement.

fabio.

D’autant que, comme il n’y a guère qu’une lieue d’ici à Mantoue…

frédéric.

Que dis-tu là ?

fabio.

Pardon, je me trompe ; je voulais dire qu’il n’y a que douze lieues.

la duchesse.

Apportez-vous une lettre du duc ?

frédéric.

Je ne serais pas revenu sans cela ?

fabio, à part.

Je n’ai jamais vu mentir avec une aussi aimable impudence.

frédéric.

Voici la lettre, madame.

la duchesse, à part.

C’est bien son écriture !… Je suis vengée !

fabio, à Frédéric.

Quelle est cette lettre ?

frédéric.

Du duc.

fabio.

Quoi ! vous voulez m’en conter à moi aussi ?

la duchesse.

Et comment vous trouvez-vous, aujourd’hui ?

frédéric.

Mais… madame, le dévouement respectueux dont je fais profession pour votre altesse est si heureux de s’employer à votre service, qu’en vérité, vous pouvez le croire, je n’ai jamais passé une meilleure nuit.

fabio, à part.

Je le crois bien ! Il a beau vouloir dissimuler et mentir, cela lui est impossible.