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JOURNÉE III, SCÈNE I.

pasquin.

Je viens étonné, émerveillé, confondu, d’une certaine chose que j’ai vue.

wolsey.

Qu’est-ce donc ?

pasquin.

Votre sépulture. — Vous faites construire une bien belle chapelle… C’est une bien grande cage pour un si petit moineau ! Mais savez-vous mon idée ? c’est qu’on ne vous y laissera pas entrer.

wolsey.

Fou, sot, malicieux coquin, sors du palais, sors à l’instant ; et ne l’avise jamais d’y remettre les pieds.

pasquin.

Voilà qui est fait.

Il sort.
Entre ANNE DE BOLEYN.
wolsey.

Permettez que je baise les pieds de votre majesté.

anne.

Levez-vous.

wolsey.

Maintenant que votre majesté vit dans la sphère du soleil, j’ai à lui demander une grâce.

anne.

Que pourrais-je vous refuser ?… Dites-moi, cardinal, ce que vous désirez.

wolsey.

Je voulais aujourd’hui demander au roi la présidence du royaume. Je compte la demander en votre présence, et si vous voulez bien me seconder, je suis sûr de l’obtenir.

anne.

Cela n’est plus possible, on en a disposé. Je ne savais pas votre désir, et je l’ai fait donner à mon père.

wolsey.

Je n’aurais pas cru, madame, que votre majesté en eût disposé sans s’informer de moi auparavant si j’y avais quelque prétention.

anne.

Et pourquoi ?

wolsey.

Il me semblait que vous deviez avoir plus d’égards pour moi que pour votre père même. Car si lui vous a donné l’être, moi je vous ai donné la couronne ; par lui vous êtes femme, et par moi vous êtes reine ; et par conséquent vous me devez à moi une toute autre reconnaissance. Mais que votre majesté y songe bien : la porte par où elle est entrée au palais n’a pas été fermée, et celui qui l’a fait