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LE SCHISME D’ANGLETERRE.

charles.

Voici ma main.

anne.

Vous me la donnez comme époux ?

charles.

Oui, mille fois oui, — quoiqu’un injuste père me veuille marié en France… Mais en ce moment je suis à Londres.

anne.

Voici le roi qui vient avec la reine.

charles.

Il ne doit pas me voir qu’il ne m’ait accordé audience. Adieu madame.

anne.

Adieu.

Charles sort.


Entrent LE ROI, WOLSEY, LA REINE, L’INFANTE et les Dames.
anne, à part.

Il faut donc encore que je baise la main du roi, et que je mette un genou à terre ! n’est-ce pas une humiliation ? (Haut.) Seigneur que votre majesté me permette de baiser sa main.

le roi, troublé, à part.

Ciel ! qu’ai-je vu ?

anne.

Daignez, sire…

le roi.

Je n’en reviens pas.

anne.

Accordez-moi cette faveur.

le roi.

Quel étrange prodige !

la reine, à part.

Le roi paraît surpris de la voir.

anne.

Sire, votre esclave…

le roi, à part.

Tout mon cœur est ému.

anne.

L’heureuse Anne de Boleyn, prosternée à vos pieds, sollicite l’honneur de baiser votre main.

le roi, à part.

Eh quoi ! mon âme se trouble de nouveau ? mes yeux voient de nouveau cette vaine image qui leur est apparue. (Bas, à Wolsey) Voilà celle que j’ai vue ce matin dans mon sommeil. Mais en ce moment je ne dors pas, je suis éveillé, j’ai la plénitude de ma raison. (À part.) Qui es-tu ? quel est ton nom, ô femme qui m’apparais comme une divinité, et qui m’enchantes par ta beauté après m’avoir entravé par de sinistres présages ?… Tu es pour moi tout à la fois et