JOURNÉE TROISIÈME.
Scène I.
Par ici, seigneur. C’est de ce côté que l’Èbre se précipite plus furieux en entrainant dans sa course les ruisseaux des montagnes ; et c’est de ce côté que ce jeune homme se dirige pour nous échapper.
Suivez-le tous, en fouillant les rochers et les taillis épais. (Ils sortent.) Quel homme s’est jamais vu dans une situation aussi cruelle ? Mon malheur est tel, que je suis obligé de chercher cela même que je ne voudrais pas trouver… comme un homme inspiré par la jalousie[1]. D’un côté le roi, mû par une sévérité inflexible, qui n’est peut-être, au fond, que de la justice, m’ordonne de ne pas reparaître devant lui qu’on n’ait arrête don Lope ; et d’autre part, la reconnaissance que je lui dois, l’affection que je lui porte me défend de l’arrêter. Situation affreuse ! Si je le prends, je manque à mon amour ; si je ne le prends pas, je manque de fidélité au roi. Comment pourrai-je, ô ciel ! satisfaire en même temps à l’amour et à l’obéissance ?
Je suis seul contre tous, et il est impossible que je n’y laisse pas la vie ; mais pour le prix auquel je veux la vendre, vous n’êtes pas assez nombreux.
Ne le tuez pas ; il importe que je l’emmène vivant. (À part.) Oh ! si je réussissais à l’arrêter, peut-être trouverais-je plus tard quelque moyen de le sauver. — (Haut.) Don Lope ?
Je reconnais votre voix avant d’avoir reconnu votre personne, car trois choses troublent et obscurcissent ma vue, la colère, le sang et la poussière ; et je ne sais même si c’est votre voix que j’ai entendue ou quelque sombre tonnerre dont le son, en me rendant immobile, m’a glacé, atterré… Eh bien ! que me voulez-vous ? car
- ↑ Littéralement : action, fille de la seule jalousie.
..... Accion
Hija de los zelos solos.