ce lieu ; vous ne devez avoir aucune crainte… Cette fois, madame, nous sommes au milieu du jour, et non pas au milieu de la nuit… Je ne vous parle pas, madame, pour vous offenser ; je ne vous parle que pour mettre ma vie à vos pieds, et vous dire que je vous suis deux fois reconnaissant.
La crainte que vous m’avez inspirée est si grande, que, même en vous voyant de jour, je ne sais si vous existez réellement, ou si vous n’êtes qu’une illusion. Du reste, don Lope, lorsque tout à l’heure en venant voir doña Blanca, je me suis en allée, ce n’a pas été à cause de vous ; c’est parce que j’ai vu ici je ne sais quel autre fantôme dont la lumière du jour est impuissante à me débarrasser.
Madame, c’est un de mes amis avec lequel je causais. Dès qu’il vous a aperçue il s’est retiré pour ne pas vous gêner. Vous aimant avec passion, il s’est éloigné pour ne pas exciter votre colère ; et il a bien fait, puisque ainsi je puis parler.
Eh quoi ! n’était-ce pas don Guillen ?
Oui, madame.
C’est donc en faveur de don Guillen qu’il me parle.
Et puisque vous alliez chez ma mère, ne m’enlevez pas l’occasion, que je vous dois à vous-même, de vous offrir mes services.
Ne me persécutez pas, de grâce ; restez tranquille.
Alors, je ne tiens plus à la vie.
Comment ! pour une occasion perdue, vous renonceriez à la vie !
Hélas ! il en est de la vie comme de l’occasion ; l’une et l’autre, une fois perdues, ne peuvent plus se retrouver.
Eh bien, profitez de l’occasion que je vous ai donnée. Je vous écoute ; que voulez-vous me dire ?
Tout ce que vous devez au plus tendre souvenir.
Vous vous êtes donc chargé de ses intérêts auprès de moi ?
N’osant pas parler pour moi-même, je vous parle au nom d’un tiers ; car l’amour que vous inspirez rend timide.