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JOURNÉE II, SCÈNE II.

peines ; et j’ai la conviction, qu’en dépit d’une étoile funeste, je trouverai chez vous toutes les consolations que j’y viens chercher.

don carlos, à part.

Il ne peut se déclarer davantage.

don juan, à part.

Il aura sans doute appris que don Carlos et Léonor étaient chez moi. (Haut.) Seigneur, je rends grâces à ma bonne fortune de l’honneur que vous me faites ; mais je ne sais comment vous répondre, ignorant qui vous êtes et ce que vous désirez.

don pèdre.

Veuillez, seigneur, vous asseoir. Voici une lettre qui vous dira qui je suis, et vous saurez ensuite ce que j’attends de vos bontés.

don juan.

La lettre est de mon honoré seigneur le marquis de Dénia. (À part.) Je ne sais que penser.

don pèdre.

Veuillez d’abord la lire, et je m’expliquerai ensuite.

don juan, lisant.

« Le seigneur don Pèdre de Lara, mon parent et mon ami, va dans votre ville à la poursuite d’un homme de qui il importe à son honneur de tirer satisfaction. Mon peu de santé ne me permet pas de l’accompagner ; mais j’aime a penser que ma personne ne lui fera point faute là où vous êtes. Je me borne à vous dire que son offense est la mienne, et que je prends à mon compte la satisfaction qu’il désire. Le marquis de Denia. » Vous avez entendu ce que m’écrit l’honoré marquis ; ma seule réponse, c’est que je me mets a votre disposition, prêt à vous servir en quoi que ce soit.

don pèdre.

Dieu vous garde ! Comme je l’espère d’après tout ce qu’on m’a dit de vous, et d’après ce que je vois, j’ai bien fait, en venant ici, de ne pas me munir d’autre secours, d’autre recommandation que de cette lettre. Le marquis, il est vrai, m’avait dit que je trouverais en vous un défenseur dévoué, à cause de l’amitié et de la reconnaissance que vous devez à sa maison.

don juan.

J’avoue hautement toutes les obligations que je lui ai ; je tâcherai de m’en acquitter avec vous ; mais, seigneur, il faut d’abord que je sache le motif qui vous amène à Valence. (À part.) Il faut boire d’un trait toute la coupe d’amertume.

don pèdre.

Je vous le dirai si je puis le prendre sur moi. Je suis noble, et, de plus, offensé, don Juan ; mon ennemi est à Valence, et je le cherche. C’est assez vous dire.

don juan.

Maintenant je sais tout comme vous-même.