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JOURNÉE II, SCÈNE II.

le capitaine.

Venez.

frédéric, à part.

Quelle situation délicate !… Je plais à la même personne que j’ai offensée, et, de plus, je vais être le geôlier de moi-même !

Frédéric et le Capitaine sortent.


Entrent L’INFANTE et SÉRAPHINE.
l’infante.

Vous ne vous attendiez pas, Hélène, à cette visite ?

hélène.

Non, belle princesse ; et votre présence en ce lieu me comble de joie et d’honneur. — Où donc allez-vous ainsi ?

l’infante.

En faisant ce voyage je n’avais qu’un seul but : je voulais vous voir.

hélène.

Je ne pourrai jamais reconnaître tant de bonté.

l’infante.

On dit que votre château est si agréablement situé, que le séjour en doit être excellent pour la mélancolie ; et voilà pourquoi on m’y envoie ; car je suis bien triste. Vous verrez si j’en ai sujet, ma cousine, quand je vous dirai mes ennuis.

hélène.

Je serai trop flattée. Seraient-ce par hasard des chagrins d’amour ?

l’infante.

Oui, l’amour y fut pour quelque chose.

hélène.

Et à présent ?

l’infante.

À présent je ne sais plus à quoi les attribuer. Ils tiennent à des causes diverses. — Vous les devinerez à ma douleur.

hélène.

Déclarez-vous, je vous prie. Moi de mon côté je vous confierai un amour qui est tout l’opposé du vôtre ; car si le vôtre a été et n’est plus, le mien, comme vous verrez, n’est pas encore et sera bientôt. — Mais asseyez-vous sur ce gazon. Ces arbres vous protégeront contre les rayons du soleil, et ces fleurs vous seront comme un tapis parfumé. — Vraiment ce lieu-ci est on ne peut plus propice aux récits d’amour.

l’infante.

Non pas encore ; plus tard. — (À part.) Commençons. (Haut.) J’ai un service à vous demander.

hélène.

Je suis entièrement à votre disposition.