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BONHEUR ET MALHEUR DU NOM.

doña violante.

Comment pouvez-vous vous plaindre de moi, don César, lorsque pour vous j’ai si tristement abandonné ma maison, lorsque pour vous je me vois prisonnière dans la maison d’autrui ?

don césar.

Oui ! après avoir échoué dans votre trahison, vous venez blâmer ce lâche attentat, pour qu’on ne croie pas que vous en étiez complice !

doña violante.

Est-il raisonnable de croire que pour désabuser un homme que je n’aimerais pas, j’eusse quitté ma patrie et mon père, et me fusse exposée à tous les ennuis ?

don césar.

Comment se fait-il donc que le seigneur Aurelio m’ait attendu au jardin ? Dans quel but a-t-il attenté à ma vie ? Qui eût pu l’instruire, hormis vous ?

doña violante.

Mon père avait pris votre lettre apportée par le valet de don Félix.

don césar.

De don Félix ?

doña violante.

Oui.

don césar.

Un moment ; car ce que vous me dites là me donne beaucoup à penser, si toutefois ce n’est pas un effet de la passion qui me subjugue encore. — Votre père a vu la lettre dont j’avais chargé pour vous le valet de don Félix ?

doña violante.

Oui ; et par cette lettre il fut informé de tout, et il m’enferma en feignant de partir.

don césar.

De là sans doute est venue l’idée où l’on est que c’est don Félix qui a causé le tumulte qui a eu lieu chez vous ; car vous saurez que je suis prisonnier ici sous le nom de don Félix.

doña violante.

Quoi ! vous passez pour don Félix ?

don césar.

Oui. Afin de pouvoir rester à Parme cette funeste nuit, je le fis partir sous mon nom.

doña violante.

Comment ! on ne vous connaît pas ici sous votre véritable nom ?

don césar.

En effet.

doña violante.

C’est donc pour cela que doña Serafina me soutenait obstinément