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JOURNÉE I, SCÈNE I.

gens dont elle n’est pas connue, et qui m’a choisi à cet effet en ma qualité d’étranger.

calabazas.

J’ai une idée bien meilleure, moi !

lisardo.

Dis-la donc vite alors.

calabazas.

Eh bien ! je dis, — et qu’on me tue si je me trompe, — je dis qu’une femme qui vient faire ainsi la belle parleuse avec un homme dont elle ne veut pas être connue est sans nul doute une laide spirituelle qui cherche à pêcher des cœurs avec son bec.

lisardo.

Et si je te disais, moi, que je l’ai vue, et qu’elle est belle comme un ange ?

calabazas.

Alors je dirais, moi, vive Dieu ! puisque vous me pressez, que c’est la Dame-Revenant qui veut recommencer à vivre[1].

lisardo.

Après tout, n’importe ! je saurai demain qui elle est.

calabazas.

Vous croyez donc qu’elle reviendra ici demain ?

lisardo.

Sans doute… Et d’ailleurs, si elle ne vient pas, avec le peu d’espoir qu’elle m’a laissé, je n’aurai rien perdu, ou presque rien.

calabazas.

Vous devriez cependant compter pour quelque chose que nous nous levions encore un jour si matin.

lisardo.

J’y suis forcé par les affaires qui m’ont conduit ici, indépendamment de ma passion.

calabazas.

Elle doit demeurer près de chez nous. Je l’ai perdue de vue en même temps que j’ai aperçu notre maison.

lisardo.

Il est déjà tard, sans doute ?

calabazas.

Il n’en faut pas douter : je vois d’ici notre hôte qui s’habille.

  1. Calderon a composé sous ce titre, la Dame-Revenant (la Dama Duende) une charmante comédie qui a été imitée en français par Hauteroche. Il est possible qu’il ait voulu y faire allusion dans ce passage.