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DE MAL EN PIS.

lisarda.

Taisez-vous, ne cherchez pas à vous excuser.

don juan.

Mais, madame, je ne…

lisarda.

Vous n’êtes qu’un cavalier discourtois, qu’un amant ingrat et infidèle.

don juan.

Est-ce que vous connaissez cette dame ?

lisarda.

Je n’ai pas besoin de la connaître ; elle ne m’a pas offensée.

don juan.

Eh bien ! écoutez et sachez…

lisarda.

Ne cherchez pas à vous excuser, don Juan. Je ne suis pas si éprise ! Ce n’est pas la jalousie qui m’anime, c’est le sentiment d’un juste orgueil blessé. Vous recevez, dans ma maison et presque sous mes yeux, une femme voilée !… Elle entre ici dans une chaise à porteurs dont les rideaux sont tirés, suivie d’un écuyer a pied !… Elle est accompagnée jusqu’à cette chambre par un valet que mes gens ne connaissent pas et qui, sans doute, vous sert de messager dans vos bonnes fortunes !… Je sais tout.

don juan.

Mais, madame…

lisarda.

Assez.

don juan.

Apprenez, je vous prie.

lisarda.

Finissons.

don juan.

C’est un de mes amis, madame, qui…

lisarda.

Cela est trop vieux, trop usé… Vous voulez me laisser entendre, n’est-ce pas, que c’est un de vos amis qui vous a emprunté votre chambre pour parler à une femme, service que les cavaliers se rendent mutuellement ? Voilà une belle excuse !

don juan.

Pour Dieu, madame, écoutez !

lisarda.

Quand une femme écoute des explications, c’est qu’elle veut être satisfaite. Moi, je ne veux pas l’être. Donnez-moi donc cette clef.

don juan.

Cette dame ne sortira pas que vous ne sachiez d’abord…

lisarda.

Je n’ai rien à savoir. Éloignez-vous de ce côté. (À Flerida.) Al-