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JOURNÉE II, SCÈNE V.

don gutierre.

Mon bien chéri, c’est moi ; ne me reconnaissez-vous pas ?

doña mencia.

Si fait, monseigneur, car un autre que vous n’aurait pas eu cette hardiesse.

don gutierre, à part.

Elle m’a reconnu.

doña mencia.

Un autre que vous ne serait pas venu ainsi me surprendre impunément.

don gutierre, à part.

Agréables paroles !

doña mencia.

Un autre que vous qui se serait présenté à moi de la sorte aurait été déchiré par mes mains.

don gutierre, à part.

Oh ! qu’il est doux d’entendre ces menaces, — ces menaces qui me rassurent ! (Haut.) Je suis trop heureux, Mencia, — pourvu que votre émotion se dissipe.

doña mencia.

Hélas ! je tremble.

don gutierre.

Non, calmez-vous.

doña mencia.

Savez-vous qu’il est bien mal au moins d’être venue — à votre altesse !

don gutierre, à part.

Votre altesse ! ciel ! qu’ai-je entendu ? — Elle n’était pas avec moi ! elle était avec l’infant ! douleur !

doña mencia.

Voulez-vous m’exposer au même péril une seconde fois.

don gutierre, à part.

Dieu puissant !

doña mencia.

Pensez-vous que chaque nuit vous pourrez vous cacher ?…

don gutierre, à part.

Jésus ! Jésus !

doña mencia.

Et qu’en éteignant le flambeau vous pourrez sortir en présence de don Gutierre ?

don gutierre, à part.

Ô jalousie ! tue-moi !

doña mencia.

Votre altesse est bien imprudente, bien cruelle.

don gutierre, à part.

Qui suis-je donc, puisque je n’ai pas la force de mourir et que je