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ÈVE



Vous savez aujourd’hui ce que chacun rapporte,
Et le meuble et l’immeuble et la chèvre et le chien.
Ô vainement assise au seuil de l’autre porte :
Mais quand on avait tout, on ne rapportait rien.

Vous savez aujourd’hui ce que chacun dérobe,
Le maître et le valet, le fils et le gardien.
Ô pauvrement assise en cette pauvre robe :
Mais quand on avait tout, on ne dérobait rien.

Vous savez aujourd’hui ce que chacun supporte,
Et l’esclave et le maître, et la femme et le chien.
Ô vainement assise au coin de l’autre porte :
Mais quand on avait tout, on ne supportait rien.

Vous savez aujourd’hui ce que chacun détourne,
Mais quand on avait tout on ne détournait rien.
Et vous savez surtout ce que tout homme ajourne :
Car c’est son sauvetage et son souverain bien.

Vous savez aujourd’hui dans quel four on enfourne
Et le pain pour hier, et le pain pour demain.
Et par là vous savez ce que tout homme ajourne :
Car c’est sa pénitence et c’est son lendemain.

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