Page:Cahiers de la Quinzaine - Série 15, cahiers 4-6, 1914.djvu/127

Cette page a été validée par deux contributeurs.
121
ÈVE


Vous en avez tant mis dans le chêne et l’érable,
Et la pierre et la terre et les marbres plus beaux.
Vous en avez tant mis sur le seuil des tombeaux.
Vous voici la dernière et la plus misérable.

Vous en avez tant mis dans de pauvres linceuls,
Couchés sur vos genoux comme aux jours de l’enfance.
On vous en a tant pris qui marchaient nus et seuls
Pour votre sauvegarde et pour votre défense.

Vous en avez tant mis dans d’augustes linceuls,
Pliés sur vos genoux comme des nourrissons.
On vous en a tant pris de ces grêles garçons
Qui marchaient à la mort téméraires et seuls.

Vous en avez tant mis dans ces lourdes entraves,
Les seules qui jamais ne seront déliées,
De ces pauvres enfants qui marchaient nus et graves
Vers d’éternelles morts aussitôt oubliées.

Vous en avez tant mis dans ce lourd appareil,
Le seul qui de jamais ne sera résolu,
De ce jeune troupeau qui s’avançait pareil
À des agneaux chargés d’un courage absolu.