de jeunesse et de civisme. Le gouvernement de la
République était chargé de nous fournir tant de jeunesse
et tant d’enseignement. L’État était chargé de nous
fournir tant de sérieux. Cette École Normale faisait un
réservoir inépuisable. C’était une grande question,
parmi les bonnes femmes du faubourg, de savoir si
c’était bon pour les enfants, de changer comme ça de
maître tous les lundis matins. Mais les partisans répondaient
qu’on avait toujours le même maître, qui était le
directeur de l’École annexe, qui lui ne changeait pas, et
que cette maison-là, puisque c’était l’École Normale,
était certainement ce qu’il y avait de plus savant dans
le département du Loiret et par suite, sans doute, en
France. Et dans tous les autres départements. Et il y
eut cette fois que le préfet vint visiter l’école. Mais ceci
m’entraînerait dans des confidences. J’appris alors,
(comme j’eusse appris un autre morceau de l’histoire de
France), qu’il ne fallait pas l’appeler monsieur tout
court, mais monsieur le préfet. D’ailleurs, je dois le
dire, il fut très content de nous. Il s’appelait Joli ou
Joly. Nous trouvions très naturel, (et même, entre nous,
un peu nécessaire, un peu séant), qu’un préfet eût un
nom aussi gracieux. Je ne serais pas surpris que ce fût
le même qui encore aujourd’hui, toujours servi par ce
nom gracieux, mais l’ayant légèrement renforcé, sous le
nom de M. de Joly ou de Joli préside aujourd’hui à Nice
(ou présidait récemment) aux destinées des Alpes Maritimes
et reçoit ou recevait beaucoup de souverains. Et
les premiers vers que j’aie entendus de ma vie et dont
on m’ait dit : On appelle ça des vers, c’était les Soldats
de l’an II : ô soldats de l’an deux, ô guerres, épopées.
On voit que ça m’a servi. Jusque là je croyais que ça
Page:Cahiers de la Quinzaine, 14e série, n°5-8, 1913.djvu/173
Cette page a été validée par deux contributeurs.
cahiers de la quinzaine
32