savoir que nous passons, mettons que nous venons de
passer par la plus mauvaise crise par laquelle ce peuple
ait jamais eu à passer. Et en outre par une crise entièrement
nouvelle. Et en outre par une crise dont on ne
pouvait avoir aucune idée. Il ne faut pas dire : Cette
race en a vu bien d’autres, elle verra bien encore celle-là,
comme dans la chanson :
J’en ai oublié bien d’autres,
J’oublierai bien celui-là.
Il faut dire : Cette race en a vu beaucoup d’autres. Elle
n’en a jamais vu autant. Elle n’en a jamais vu de
pareille. Elle passera bien celui-là. Aussi. En plus. Elle
a dans les veines le plus beau sang charnel. Et elle a
des patrons comme il n’y en a pas dans le monde.
Il y a d’autres sagesses. Il y a d’autres formes. Il y a d’autres statuts. Il y a une sagesse avertie, une sagesse vaccinée, une sagesse sérieuse, une sagesse sévère, une sagesse après. Mais comment ne pas regretter la sagesse d’avant, comment ne pas donner un dernier souvenir à cette innocence que nous ne reverrons plus. On ne peut se représenter quelle était alors la santé de cette race. Et surtout cette bonne humeur, générale, constante, ce climat de bonne humeur. Et ce bonheur, ce climat de bonheur. Évidemment on ne vivait point encore dans l’égalité. On n’y pensait même pas, à l’égalité, j’entends à une égalité sociale. Une inégalité commune, communément acceptée, une inégalité générale, un ordre, une hiérarchie qui paraissait naturelle ne faisaient qu’étager les différents niveaux d’un commun bonheur. On ne parle aujourd’hui que de l’égalité. Et nous vivons dans la plus monstrueuse