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XXV


Ne me dites pas que ce contrat avait force de loi parmi les générations qui m’ont précédé. Car cette loi ne m’engage à rien, 314 moi qui n’ai pu ni la discuter, ni la voter. Et s’il me fallait vivre, courbé sous les décrets qui régissaient les morts, je m’écrierais : Creusons avec nos ongles dans la terre des tombeaux, ramenons-la sur nous et laissons aux squelettes l’administration de ce monde. — Mais je m’assure que le sacrifice des vivants serait un triste et inutile hommage à rendre aux morts.


XXVI


Si la mission dont vous voulez m’imposer l’observance m’était avantageuse, il ne serait pas nécessaire de l’appuyer de menaces terribles. Je serais porté vers son accomplissement par l’attrait même de ma nature ; je ne serais pas réduit à m’élever contre elle du cri suprême de mon sang. Je vivrais tout bêtement, comme l’épicier du coin, sans savoir d’où je viens, où je vais, et le plus souvent même, ce que je fais dans le monde.

Ah ! que parlez-vous de missions, de devoirs, de peines et de récompenses éternelles, de balançoires enfin, à celui qui tient le couteau de sa droite amaigrie, et frénétiquement le porte dans l’incurable plaie de son âme ! — La mort est la seule déesse qui console les désespérés !