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blancs les linceuls et les os qu’ils recouvrent. Blanche est aussi ma gorge comme le rabat du prêtre. — La Mort moissonne en Janvier !

« Noirs sont les squelettes des arbres ; noire la nuit, noir le jour ; noir le couvercle du firmament ; noirs les cercueils et les cendres qu’ils renferment. Noirs sont aussi mes yeux, ma tête et mes pattes crochues. Je suis vêtue comme le prêtre, tristement et chaudement. — La Mort moissonne en Janvier !

» Il y a des pleurs dans l’air et dans les yeux ; le fleuve charrie des glaçons ; le pauvre est couché sous la neige, près de l’herbe du champ ; les rois meurent sur leurs trônes ; les perles du diadème pénètrent dans leurs crânes comme des poignards rougis. — La Mort moissonne en Janvier !

» La faim me rend cruelle ; je ne veux pas mourir. J’ouvrirai la tête de mes sœurs avec mon bec pointu, je leur viderai le crâne. La plus forte de nous enterrera les autres. Je suis l’exemple des hommes. — La Mort moissonne en Janvier !

« Je ne viens point t’annoncer ta mort : le Dieu des esclaves laisse vivre les hommes libres afin de les faire souffrir. Je ne chante pas la mort de tes amis : pour eux comme pour toi, la mort serait un bien. Je viens t’annoncer la fin de plusieurs altesses couronnées. — La Mort moissonne en Janvier ! »

— Oiseau de malheur ! Et que m’importe la mort des rois ? Je ne les connais point, je ne les aime point, je ne les hais point. 399 Les rois sont