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vie, et je n’ai pas l’espoir d’un lendemain ! »

La détention perpétuelle ! ténèbres sans aurore, hiver sans printemps, pluie noire sans arc-en-ciel, rocher sans sources, pierre tumulaire recouvrant une âme que tous renient pour la sœur de leur âme ! — Couche en tessons de bouteilles où se plaindrait Montézuma ! — Souricière à jour, pratiquée pour l’œil de la police, dans laquelle Blanqui perd patience ! — Mort chronique qui fait désirer la mort aigüe par la potence, et qui inspire ces suprêmes pensées :

« C’est une douce chose que le sommeil qui nous repose de la vie sans nous faire cesser de vivre ; c’est une divine chose que la mort qui nous repose de la vie sans nous faire cesser d’être. »

« Souffre-t-on beaucoup pour mourir ? Moins, j’en suis sûre, qu’on ne souffre pour vivre. Autrefois j’avais peur de la Mort et je la traitais en ennemie ; aujourd’hui je la rêve souriante et douce, et je la nomme tout bas la Libératrice. Je sens que son éternité ne brise que nos chaînes ; je sens que son froid baiser endort plus de douleurs qu’il n’éteint de joies. »

« De mes visions fantastiques, il en est une seule que j’aime, 363 et celle-là je veux la dire : Ma cellule prend l’aspect d’une tombe, et tout à coup la tombe s’illumine sous la forme radieuse d’un berceau. Que cette image est douce ! Chaque fois qu’elle m’apparaît, je voudrais la retenir ; mais à peine m’a-t-elle souri qu’elle s’évanouit comme un songe, emportant avec elle