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nouvelles. On peut me reconnaître à mes productions comme l’artisan à ses œuvres, comme l’arbre à ses 42 fruits. D’ailleurs, je n’ai plus dix-huit ans, l’âge où l’on choisit la presse pour maîtresse et le club pour cabinet d’étude, l’âge où l’on s’enveloppe dans les plis d’un drapeau sans avoir lu sa devise, sans l’avoir méditée. — Je ne le pourrais plus !


XIII

Je travaille comme le semeur qui ne se repose qu’en sa couche, je travaille comme le soleil qui n’étend sa fatigue que sur le sein des mers. J’attends le soir pour me rafraîchir et me délasser, le soir qui rend les eaux du fleuve transparentes pour y bercer la lune, le soir qui rend les draps rudes de mon lit plus doux que des feuilles de rose.

J’utilise le mieux que je puis les courtes heures du jour. Mais mon bon vouloir souffre du manque des procédés expéditifs que l’Avenir réserve à ceux qui, comme moi, manieront la pensée.


La Pensée ! si consolante pour nous, si peu gênante pour les autres ! La rieuse qui ne s’occupe pas d’affaires, qui ne l’ait point de bruit, qui n’ambitionne ni richesses ni grandeurs, qui toujours est de bonne composition et d’humeur facile ! La féconde qui n’a besoin pour croître que d’un peu de brise et de soleil, d’une belle mati-