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m’ont-ils fait consumer ma jeunesse sur d’absurdes études ? Pourquoi suis-je épuisé ?

Hæret lateri lethalis arundo !


Si du moins une jeune fille répandait sur ces strophes ses larmes virginales, si quelque bon vieillard les lisait à ses petits enfants dans les longues veillées, si le prisonnier les méditait au fond de son cachot, si le proscrit et l’émigrant les répétaient aux brises lointaines, si je pouvais espérer qu’elles fussent traduites dans les belles langues de Castille et d’Ausonie !…

Alors je m’endormirais paisiblement du suprême sommeil, et je m’écrierais : Soyez bénis, oiseaux des cieux qui chantez pour ceux qui ne sont plus ! Allez faire vos nids dans l’aubépine des tombes ! Allez boire la rosée dans les pétales des mauves et des immortelles ! Aimez, soyez heureux ! Et quand il pleuvra trop fort, abritez bien vos ailes sous les cyprès qui protègent les morts de leurs épais rameaux !

… « Oh la belle élégie ! Tu passeras deux nuits blanches pour l’avoir faite. » — Ainsi gronde en mon flanc le Mal au regard fixe.

Hæret lateri lethalis arundo !


Passez, passez donc, ô beaux jours de jeunesse, lents comme la tortue, tristes comme la hyène, lourds, glacés comme la grêle sur la vigne fleurie ! Passez, jours monotones, interminables nuits ; bâillez, soupirez, imposez-vous à moi !

Hæret lateri lethalis arundo !