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ne sont attirés par une grande masse d’électricité contraire. De même, jamais les hommes ne s’attachent qu’à plus riches ou plus renommés qu’eux. Ceux qui se donnent de faux airs de démocratie, plus encore que les autres ; car ils sont les plus pauvres et les plus ignorés de tous.

L’homme est le même dans tous les climats, dans tous les partis, sous tous ses masques, ses drapeaux et ses discours : un animal droit comme un peuplier, et rampant comme un ver ; son regard est au ciel, et son âme en la fange ; sa lèvre est orgueilleuse, et ses mains enchaînées ; il a des entrailles qui ne lui servent que pour manger, il se rase afin de ressembler aux femmes ; il peut faire l’amour en tout temps, et ne pousse pas un soupir qui ne lui soit arraché par le calcul ; il est de braise pour la prospérité, de glace pour le malheur !

…… Ainsi j’allais seul avec mon désespoir et mon travail ingrat. Je maudissais le passé, le présent, l’avenir. Je maudissais ma route, je maudissais mon jour. De toute la nature je ne voyais que le côté sombre et décourageant. C’était l’hiver. Je regardais le lac, et le lac mugissait, et sur ses rives je ne découvrais pas un roseau vert auquel me reprendre si j’y tombais. Je regardais l’abîme ; et les buissons qui croissent sur ses bords ne portaient plus que des épines. Je regardais le torrent ; il était gonflé comme 7 mes veines fiévreuses, dans sa fureur il roulait des blocs de rocher aussi facilement que des pailles d’avoine. Je