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III


123 Les troupeaux participent à l’allégresse générale. Car les Suisses savent bien qu’ils doivent la prospérité de leur pays aux superbes races de Fribourg et de Schwytz, et ne rougissent pas de s’en montrer reconnaissants.

Ils promènent leurs belles bêtes couronnées de guirlandes, leur donnent la place d’honneur dans le cortège nombreux, les caressent, leur parlent et s’en font aimer.

Qu’elle est touchante l’association de l’homme et de l’animal ! Elle relève le second sans abaisser le premier. L’homme s’ennoblit en respectant la force et la beauté partout où il les trouve, en ne déprimant pas, en ne torturant pas les créatures qui partagent ses travaux[1]

Tu ne boiras pas de sang, dit l’Homme du Sinaï !

  1. Ma nature me défend de rien entendre aux lois de l’épargne : tant mieux, ai-je dit bien souvent en mon cœur. Certes, ce n’est pas moi qui recommanderai jamais aux paysans de France de suivre l’exemple des pauvres Savoyards qui, n’ayant qu’une vache laitière, sont obligés de la mettre à la charrue. Je ne puis comprendre que des hommes dits de progrès approuvent et conseillent des mutilations semblables. Je demande à M. E. Sue qui s’en fait l’apologiste et le propagateur, s’il voudrait aussi voir travailler les femmes nourrices ? Je lui demande si l’existence est double en son essence ; si l’on ne doit pas en respecter l’intégrité sainte chez la vache comme chez la femme ; si les forces vitales ont ou non des bornes, et si l’on n’est pas coupable de meurtre quand on exige d’elles plus qu’elles ne peuvent don-