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Le souffle de la Réforme

nous répondrions que c’est un défaut dont il se corrigera sans doute tous les jours et auquel il serait absurde de s’arrêter. Il y a tant de perruques ordinairement à l’Assemblée législative, qu’il serait désirable d’y voir de jeunes hommes intelligents et qui puissent réveiller ces vieillards endormis aux bornes du Moyen-Âge. » C’était aussi le temps des polémiques religieuses dans les églises ou les sacristies, le dimanche après-midi d’ordinaire. Deux prêtres dont l’un jouait le rôle du ministre protestant et l’autre, celui du polémiste catholique se donnaient la réplique dans une controverse animée. On se posait de part et d’autres des objections facilement résolues. Pour plus de sûreté, la première était précédée d’une répétition générale. Mais le public se lassa de cet espèce de guignol, ou c’était toujours le même polichinelle, le ministre protestant, qui était hué et battu. Il voulut dès lors un véritable prédicant en chair et en os pour répondre au prêtre. C’est ainsi que Chiniquy, du temps qu’il était l’apôtre de la tempérance, fut invité à Sainte-Marie-de-Monnoir pour soutenir une discussion avec le pasteur Roussy, hôte du curé pour la circonstance. Le sujet de la conférence était : « L’inspiration des livres saints ». M. Chiniquy, qui tenait les foules suspendues à ses lèvres, eut la partie plus chaude qu’il croyait. Venu dans la candeur de sa foi, avec la certitude de confondre son antagoniste, se fiant à son inspiration et à sa facile éloquence, il fut grandement surpris de trouver dans le ministre un exégète habile, et d’une érudition insoupçonnée. Celui qu’il croyait réduire au silence, le tint au contraire sur le gril durant trois heures. Poursuivi à coups de textes jusque dans ses derniers retranchements, l’apôtre de la tempérance ne s’en sauva qu’avec son esprit, un esprit vif et souple, félin, qui retombait toujours sur ses pattes. Il arriva un singulier accident à M. Chiniquy : venu pour combattre l’hérésie, l’arme qu’il dirigeait sur son adversaire lui éclata dans la main : le doute était entré dans son âme pour n’en plus sortir. Ce fut la fin des polémiques religieuses dans les églises. — Les assemblées contradictoires auront peut-être le même sort un jour. — Il advint que