Page:Côté - La Terre ancestrale, 1933.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.
88
la terre ancestrale

Par ce jour fatiguant, Hubert avait souffert de la chaleur, peut-être plus que les autres. Comme un grand nombre, il ne voyait qu’un remède à sa fatigue : la taverne. Ces établissements sont toujours fort achalandés durant la belle saison. Commis de bureau, fonctionnaires de toutes sortes, ouvriers en habits de travail, s’y rencontrent et s’y coudoient. Chacun reste d’abord tranquillement collé à son siège et se plaint de la journée. Après quelques verres, les muscles sont engourdis et la fatigue ne paraît plus. Petit à petit, on en vient à ne plus s’apercevoir de la chaleur. Les voix s’élèvent : on s’interpelle d’un bout à l’autre de la salle. Les cerveaux s’échauffent de plus en plus, les propos grossiers se croisent, les farces vulgaires ont un franc succès. L’un raconte ses chicanes, l’autre à pleine voix dit ses misères : un autre, en public, dévoile les secrets de sa famille. Quelques-uns, entrés là la tête lucide, l’intelligence brillante, tombent, avant la fin de la soirée, au niveau des buses. Dans un coin, on se chamaille pour un oui ou un non. Deux ivrognes, quoique partageant la même opinion, discutent avec acrimonie. Un soulard, ayant mal interprété un mot, persiste à ne pas vouloir comprendre, et s’indigne, malgré les explications répétées de ses compagnons.

Hubert Rioux, attablé avec quelques amis, buvait