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Schenker — ces bonnes figures, ces pauvres figures de travailleurs, assez peu illuminés, mais un peu illuminés quand même par nos efforts. Nous avons fait ce que nous avons pu et en tout cas il en est resté vaguement quelque chose dans le cœur de ces gens. L’un d’eux, Gumani, l’un des plus pauvres, a apporté un petit paquet de raisins secs pour que nous trois puissions nous en faire plaisir pendant le voyage. C’est le même Gumani qui dictait à un de nos amis indiens, pour le traduire en anglais, le billet suivant à l’adresse de Frazer Hoyland : « Gumani envoie ses salutations à Frazer Sahib et espère qu’il est en bonne santé. Il travaille au village de Bochaha et bâtit maintenant sa maison. Il est très pauvre, mais quand même heureux. » Suit la marque de son pouce… Ce Gumani a la meilleure figure du monde, et au moment où ils se pressaient autour de l’auto qui se remettait en marche pour quitter définitivement Bochaha, tous ces pauvres gens paraissaient autant de « Gumanis » aux visages un peu obscurcis et durcis par les soucis de leur archi-dure existence. « Adieu, Gumani, il valait la peine d’aller tout là-bas et de patauger et de barboter dans cet effort de bonne volonté pour rencontrer de bons types comme toi. »


Se connaître et s’aider.

Chacun sait théoriquement que ces « bons » types existent partout, mais encore faut-il faire un effort réel et sérieux pour se rapprocher d’eux. Nous en avons fait un, assez fantastique mais bien intentionné, et il va produire des fruits concrets, tangibles. Gumani va avoir sa petite maison au sec au lieu de patauger pendant deux ou trois mois avec toute sa famille dans 60 centimètres d’eau pendant la saison