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CHAPITRE II.

témoignage est postérieur à celui des Singhalais de deux ou trois siècles. Csoma nous a conservé les noms de ces dix-huit sectes, dont les adeptes faisaient remonter leur dissidence jusqu’aux principaux disciples de Çâkya[1] ; il paraît qu’elles s’étaient déjà développées antérieurement à l’époque de Kanichka, qui tombe un peu plus de quatre cents ans après la mort de Çâkya. Ce sera pour la critique, lorsqu’elle aura réuni plus de matériaux, un curieux sujet de recherches que la comparaison des deux listes qu’en donnent les Tibétains et les Singhalais. Actuellement ces listes sont assez dissemblables ; mais bien des différences disparaîtront certainement devant la synonymie des dénominations. Les Mahâsam̃ghîkâs sont connus de part et d’autre, de même que les Hêmavatâs et les Kassapiyâs qui sont les Hêmavatâs et les Kâçyapriyâs (pour Kâçyapîyâs) des Tibétains, Les Pûrvaçâilâs et les Avaraçâilâs des Tibétains se retrouvent également dans les Sêliyas orientaux et occidentaux des Singhalais ; ces trois dernières sectes sont, selon les Tibétains, des subdivisions des Mahâsam̃ghîkâs qui remontent à Kâçyapa. L’auteur du Mahâvam̃sa pâli nous apprend qu’elles sont postérieures au iie siècle après la mort de Çâkya. Une autre division des Mahâsam̃ghîkâs, les Pradjñaptivâdinas, se retrouve dans les Pannattivâdâs des Singhalais, et peut-être les Bahuçrutîyâs nous cachent les Bâhulikâs du Mahâvam̃sa. Les Vatsiputriyâs des Tibétains peuvent être aussi les Gôkulikâs des Singhalais. Les Dharmaguptâs des Tibétains sont les Dhammaguttikâs du Mahâvam̃sa : il est bon de remarquer ici le rapport de la liste tibétaine avec l’énumération singhalaise ; car pendant que les Tibétains placent les Dharmaguptâs immédiatement au-dessus des Bahuçrutîyâs, les Singhalais rapprochent également les Dhammaguttikâs des Bâhulikâs, quoiqu’ils les fassent postérieurs. Les Mûlasarvâstivâdâs, malgré l’altération et la diminution du mot, sont reconnaissables dans les Sabbhatthavâdinas des Singhalais ; et les Râdjagiriyâs des Singhalais peuvent bien n’être que les Abhayagirivâsinas des Tibétains. En résumé, sur les dix-neuf noms dont se compose la liste des Tibétains, nous retrouvons déjà, et sans aucun autre secours que les listes elles-mêmes, douze noms ou identiques, ou analogues. Je puis donc reproduire ici ces deux listes, en marquant par des étoiles les noms qui désignent de part et d’autre les mêmes schismes.

LISTE TIBÉTAINE.
ÉNUMÉRATION SINGHALAISE.
Râhula. — Âryasarvâstivâdâs. * Mûlasarvâstivâdâs. (Un schisme non désigné.)
* Kâçyapîyâs. * Mahâsam̃ghikâs.
* Mahîçâsakâs. * Gôkulikâs.
* Dharmaguptâs. * Êkabbyôhârikâs.
* Bahuçrutîyâs. * Pannattivâdâs.
* Tâmraçâṭîyas. * Bâhulikâs.
* Vibhadjyavâdinas. * Tchêtiyavâdâs.
Upâli. — Âryasammatiyâs. * Kâurnkullakâs. * Sabbatthavâdinas.
* Avantakâs. * Dhammaguttikâs.
* Vatsiputrîyâs. * Kassapîyâs.
Kâçyapa. — Mahâsam̃ghikâs. * Pûrvaçâilâs. * Sam̃kantikâs.
* Avaraçâilâs. * Suttavâdâs.
* Hêmavatâs. * Hêmavatâs.
* Lôkôttaravâdinas. * Râdjagiriyâs.
* Pradjñaptivâdinas. * Siddhatthikâs.
Kâtyâyana. — Âryasthavirâs. * Mahâvihâravâsina. * Pubbasêliyâs.
* Djêtavanîyâs. * Aparasêlikâs.
* Abhayagirivâsinas. * Vâdariyâs.
  1. Csoma, Notices on the life of Shakya, dans Asiat. Res. t. XX, p. 298.